lundi 19 janvier 2015

Approbation et aussi questionnement sur un article de Mgr Batut



À son tour, et nous nous en réjouissons, l’évêque de Blois, Mgr Jean-Pierre Batut a exprimé en des lignes très claires (Le Figaro, page « Débats » du vendredi 16 janvier) sa réaction négative sur l’injonction du matraquage totalitaire de dimension mondiale à acheter impérativement Charlie-Hebdo.


Il écrit excellemment : 
« Et la radio d’État dédiée à la culture dressait dans son journal de 7 heures la liste des quotidiens qui n’avaient pas publié la caricature de Mahomet. Certains, nous précisait-on, « s’en étaient tirés » (sic) en publiant la photo du comité de rédaction de Charlie-Hebdo. Ils étaient lâches, mais s’en sortaient avec l’indulgence du jury ».

Et encore : 
« Car enfin, a-t-on pris la peine de réfléchir deux minutes sur ce que signifie la promotion universelle d’un hebdomadaire qui était il y a quinze jours au bord du dépôt de bilan et dont il faut désormais s’afficher lecteur – mieux, auquel il faut s’identifier à l’échelle planétaire ».

Et : « La culture de la dérision a montré ses limites : les sociétés occidentales se déshonorent si elles la présentent comme le nec plus utra de la pensée et si elles mettent la monde entier en demeure d’y adhérer ».

Comme nous l’avons fait pour notre part dès la publication des caricatures (cf. : notre texte précédent) il exprime sa pensée sur les conséquences de la transgression de Charlie-Hebdo vis à vis des musulmans.

Notons d’ailleurs que quelques heures seulement après notre texte de vendredi 16 sur les conséquences ailleurs qu’à Paris, des caricatures du numéro en cours, les foules de fanatiques, d’abrutis, assimilant Charlie parce que français et le christianisme, incendiaient des églises au Niger et au Pakistan, brûlaient vifs et massacraient des chrétiens.

Mais là où nous ne suivons pas le raisonnement de Mgr Batut c’est lorsqu’il écrit : « L’interdiction de représenter Mahomet s’enracine dans le précepte du Décalogue « tu ne te feras pas d’image » (Exode 20, 4). Or, ce commandement a pour but d’empêcher toute idolâtrie d’un être vivant que l’on substituerait à Dieu. Que le musulman « de base » le sache ou non – les musulmans sont souvent aussi peu instruits de leur foi que les chrétiens, ce qui n’est pas peu dire -, l’interdit de représentation ne relève donc pas d’une sacralisation de la personne de Mahomet, mais au contraire d’un refus délibéré de le sacraliser, car il n’y a d’autres dieu que Dieu.

L’interdit du Décalogue de faire « des images » (ou autres représentations) nous semble en effet valoir pour Dieu, qu’on ne saurait représenter au risque de tomber dans l’idolâtrie des représentations telles que sous la forme du Veau d’or. Or l’islam a toujours enseigné que Mahomet n’est pas Dieu, qu’il est certes un prophète, ses croyants instruits précisant autant que nécessaire qu’il n’est qu’un homme.

Aussi on ne voit pas comment l’interdiction de sa représentation équivaut à un « refus délibéré » de le sacraliser pour la raison qu’il n’ya d’autres dieu que Dieu.

Au contraire de Mgr Batut, les islamologues font observer l’ambigüité que sécrète l’injonction coranique incessante du « Croyez en Dieu et en son prophète » (S. IV, v. 136), « Obéissez à Dieu ! Obéissez au prophète ! » (S. 57, v. 33). Et selon les Hâdiths (De la foi, ch. 7), ce dernier d’ailleurs n’assène-t-il pas qu’il faut l’aimer plus que tout le genre humain ?

Aussi ne sommes-nous pas persuadé du bienfondé de l’assimilation du 4e commandement (d’ailleurs très modelé ensuite par le christianisme légitimant la représentation non idolâtrique) avec l’interdit islamique. « Idolâtré » n’est sans doute pas le mot qui convient mais Mahomet n’est-il pas tout de même sur-humanisé, sacralisé ?

Cela dit, il y a d’autres manières de ne pas accepter la théocratie totalitaire islamique, c’est le droit de critique, de réfutation et de refus à exprimer autrement que par des provocations exacerbant le fanatisme.

Nous qui sommes certes des patriotes, mais aussi des solidaristes chrétiens, des défenseurs de la dignité humaine pour tous, nous éprouvons certes beaucoup d’horreur devant les massacres de tous nos compatriotes, athées, chrétiens, juifs ou musulmans par les Merah, les Nemouche, les Kouachi, les Coulibally. Mais tout de même, pour prendre un seul exemple, ce n’est pas parce que le Nigéria est loin et africain que nous ne sommes pas, depuis des années révoltés par les indicibles abominations qu’y subissent nos frères chrétiens dont nous avons fait parler à Paris un témoin poignant. Pour nous qui sommes finalement bien plus internationalistes que certains, le sort des enfants nigérians, syriens ou irakiens assassinés nous émeut autant que celui des victimes françaises. Car ni le déni d’humanité, ni la terreur, ni la souffrance des victimes ne peuvent se ramener à une compassion préférentielle.


Au moment où je termine ce blog on me décrit, et ça me suffit, le contenu du Charlie-Hebdo internationalement livré par centaines de tonnes aux masses bêtasses. Pas d’innovation ! Mais de la continuation. Les fidèles seront contents du gras, du grotesque, du graveleux et surtout bien sûr, ce n’est pas dangereux, de la déjection antichrétienne : du gros rire pour Hollande, quoi.