À plusieurs reprises, car la caque sent toujours le hareng, j'ai eu l'occasion de dire combien Le Figaro, tant sur le plan politique que culturel, était imbibé par la doxa mainstream. La plupart du temps très sournoisement. Sciemment ou inconsciemment.
On en a des exemples quasi quotidiens avec les articles (notamment ceux d'Hélène Vissière et d'Adrien Jaulnes) consacrés à la campagne électorale aux États-Unis. C'était déjà sensible quand Sleepy Joe (« Biden le dormeur ») était le candidat du camp démocrate. C'est devenu criant depuis que Kamala Harris, qui coche toutes les bonnes cases pour les bien-pensants (gaucharde, woke, femme, noire – ou supposée telle, pro-palestinienne), est entrée en lice.
Pour la deuxième fois en moins de deux mois, Trump a fait l'objet d'attentats. Qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas, c'est lui qui, en l’occurrence, était visé. C'est lui qui est la cible. Lui qui est « l'homme à abattre », comme le disent au figuré (espérons-le) les Démocrates. Mais aussi « l'homme à abattre », comme le pensent (au sens propre pour le coup) des flingueurs peut-être chauffés à blanc par les discours anti-Trump sans nuances de Biden et de Kamala Harris.
Le Figaro pourrait relever ces faits bruts. Ce n'est pas le cas. Dans son édition du 17 septembre dernier, donc après le second attentat, le quotidien « de droite » écrivait : « Les soutiens du candidat républicain à la Maison-Blanche mettent de l'huile sur le feu, dans un climat de plus en plus délétère à l'approche du scrutin présidentiel ». C'est sur Trump qu'on tire, mais ce sont ses partisans qui mettent de l'huile sur le feu... Faut oser, non ? On croirait du CNN traduit à la va vite. Plus politiquement, sur Fox News, Mike Waltz, l'élu républicain de Floride, déclare : « La rhétorique contre le président Trump, l'argument qu'il est le prochain dictateur, le prochain Hitler, doit cesser ! » Peu de jours avant la tentative d'attentat en Floride, David Axelrod, ancien stratège de la campagne d'Obama, lançait un cri d'alarme (relayé par Le Figaro) : « Les trumpistes cherchent à dézinguer Kamala ». Mauvaise pioche, camarade...
On pourrait, sur bien d'autre sujets, épingler cette manière faux derche de rester dans le convenu, le convenable, le formaté. Ainsi les articles consacrés au Rassemblement national sont-ils systématiquement fielleux quand ceux dévolus à LR (47 députés...) débordent de bienveillance. Et Le Figaro se félicite de « l'effet Barnier » (une sorte de peuplier pourtant : long, triste et ne portant pas de fruits...).
Les reportages sur « la parenthèse enchantée » des JO, y compris la cérémonie d'ouverture... ouvertement blasphématoire, auront été – et continuent de l'être – un péan ininterrompu de l'événement : « Ces Jeux olympiques et para-olympiques, fabuleuse vague d'émotion et d'enthousiasme » ; « Ces Jeux totalement réussis, festifs, passionnés, émouvants (nous avons versé une petite larme) ; « Les Français se sont appropriés ces Jeux parfaitement organisés, les ont aimés, chantés, dansés » ; etc.
Quelqu'un me disait récemment lire Le Figaro parce que Présent a disparu. Et qu'il faut bien lire un quotidien, le moins à gauche si possible. Pas sûr...
Alain Sanders