lundi 27 mai 2024

Les libres propos d'Alain Sanders

 

Macron : joujoux sur le Caillou...

Depuis 1984, l'unité et l'intégrité de la Nouvelle-Calédonie sont mises sciemment en danger. Malgré des élections et des référendums successifs qui confirment très majoritairement la ferme volonté de nos compatriotes du Pacifique Sud de rester français, on a continué de nourrir – et Chirac en a été un des initiateurs – une idéologie indépendantiste mortifère. Et Macron (« La colonisation, crime contre l'humanité ») en a remis plusieurs couches. On ne compte plus – jusqu'au soulèvement insurrectionnel de ces derniers jours – les violations impunies des lois de l’État. Avec la scandaleuse manipulation et l'amputation raciste du corps électoral à la clef.

Au regard de l'immensité du Pacifique couvrant 1/3 de la surface du globe et s'étendant sur 16 000 km de Panama aux Philippines et sur 8500 km de la Californie au Japon, les 400 km de long de la Grande Terre calédonienne apparaissent lilliputiens. C'est d'ailleurs pour cela que l'on parle du « Caillou ».

L'image est sans doute exacte par rapport aux masses continentales qui bordent le Pacifique (l'Amérique et l'Asie). De même, les habitants de la Nouvelle-Calédonie – qui est à bien des égards un territoire vide – sont une population bien modeste par rapport aux milliards d’habitants de l'Asie et du continent américain.

Mais c'est là une illusion d'optique. La Nouvelle-Calédonie fait en effet figure de géant dans un Pacifique balkanisé par une poussière de micro-États insulaires. Elle est la plus grande des îles qui constituent la Mélanésie, la Micronésie et la Polynésie.

Ces micro-États (les États du Kiribat, les Tonga, Tuvalu, Nauru, Niue), peu viables économiquement (l'eau potable de Nauru est importée d'Australie...), exposés à des risques naturels récurrents, à la merci de potentielles occupations étrangères, constituent autant de facteurs d'instabilité dans la zone Pacifique (on se souvient notamment des affrontements raciaux graves entre Indiens et Mélanésiens aux Fidji)

Le 10 décembre 1982, sous l'égide de l'ONU à Montego Bay (Jamaïque), fut adoptée, après des années de pourparlers, la Nouvelle Convention sur le droit de la mer. Elle reconnaissait aux États côtiers la souveraineté sur les ressources marines dans une zone (dite « zone économique ») d'une largeur de 200 miles à partir du rivage (soit quelque 370 km). La France devenait ainsi, avec 10,9 millions de km2 de superficie marine, la deuxième puissance maritime du monde (pratiquement ex-æquo avec la Grande-Bretagne).

Perdre la Nouvelle-Calédonie, ce serait s’exclure de la compétition océanologique mondiale. Ce serait se priver de l'exploitation des champs de nodules polymétalliques parsemant le fond de l'océan Pacifique. Ce serait renoncer à l'exploitation des ressources pétrolifères contenues dans les couches sédimentaires qui entourent la Nouvelle-Calédonie par 2000 à 3500 m de profondeur. Ce serait abandonner l'exploitation de la plus grande réserve mondiale de pêche thonière. Ce serait se couper de la route qui relie le Japon ou Vladivostok au pôle Sud et à l'Antarctique (à savoir le continent qui dominera la fin du XXIe siècle parce qu'il est un véritable coffre-fort de minerais rares).

Il y a beaucoup de mesures qui s'imposent pour faire de la Nouvelle-Calédonie autre chose qu'un chaudron infernal attisé par le racisme kanak. Citons en quatre. La richesse viendra des hommes, de l'océan, des services (tourisme notamment), de la culture :

1.     Les hommes. Il faut peupler la Nouvelle-Calédonie qui est, répétons-le un territoire vide. Pour créer une économie, il faut un marché, donc des acteurs et des acheteurs. Ce qui implique une population conséquente. Il faut donc une politique d'incitation fiscale au peuplement, à la nouvelle frontière démographique. Il faut une ville nouvelle au nord de la Grande Terre, une ville capable de « rééquilibrer » Nouméa.

2.     L'océan. Développement de l'économie de la mer : pêche thonière, aquaculture tropicale avec des fermes marines, exploitation de la zone économique, ressources pétrolières profondes et énergie thermique des mers utilisant la différence de température (- 20%) entre les eaux de surface et les eaux de profondeur.

3.     Les services. Tout est à faire quand on sait que le tourisme métropolitain reste dérisoire. Il faut casser les prix des compagnies aériennes et faire jouer la concurrence. Développer les équipements hôteliers.

4.     La culture. Créer une Université française du Pacifique. Pas un vague IUT tropical, mais le pendant français des Berkeley et Stanford. Une université pour les technologies de pointe, pour l'astrophysique, la biologie. Une université dont le bassin de recrutement doit être la Californie, le Japon, l'Asie du Sud-Est. Un instrument de conquête culturel, le fer de lance de la pénétration économique française dans le Pacifique. Une vitrine de la France des grands desseins.

Face à des enjeux vitaux, les gesticulations de Macron – 17 heures sur zone, douche comprise... – sont plus que dérisoires : indécentes. Quant à sa déclaration de ravi de la crèche (qui rappelle son « étonnement » après les émeutes de juin dernier), elle résume tout : « Ce mouvement d'insurrection absolument inédit (sic), personne ne l'avait vu venir avec ce niveau d'organisation et de violence ».

Il ne sait rien, il ne voit rien, il ne prévoit rien, il n'anticipe rien. Il ne sert à rien. Sinon à nuire chaque jour un peu plus à la France.

Alain Sanders