lundi 30 octobre 2023

Réflexions et Répliques

§     Allah Akbar ! « Une devise clamée aussi par les chrétiens orientaux » (sic !)

C’est la stupéfiante contre-vérité, à faire hennir les constellations, comme aurait dit Léon Bloy, proférée ce dernier samedi dans un débat sur France-Inter, par une de ces aussi arrogantes qu’ignorantes commentatrices qui se croient autorisées à parler sur tout alors qu’elles ne savent à peu près rien sur l’essentiel des sujets sur lesquels elles pérorent.

Tantôt transcrit « Allah Akbar », tantôt « Allahouakbar » à la façon d’Houria Bouteldja (la fanatique islamo-gauchiste algérienne habitant en France et idéologue du racisme antiblanc), cette formule est fréquemment utilisée comme un slogan de manifestation islamiste. Elle est appelée « akbir », signifiant « magnification », c’est-à-dire la proclamation de la grandeur de Dieu, « akbar » signifiant « le plus grand » ou encore « au-dessus de tout ».

Notre ami, le professeur toulousain en islamologie, Dominique Urvoy(1), enseigne que pour le croyant qui prononce « Allah Akbar » la formule signifie non seulement « Dieu est le plus grand » mais « Lui seul est grand ». Son origine est dans le Coran (sourate XVII, verset 111) : « Louange à Dieu ! Il ne s’est pas donné de fils ; il n’a pas d’associé en la royauté. Il n’a pas besoin de protecteur pour se défendre contre l’humiliation ». Ce takbir est récité par deux fois lors des appels à la prière, puis au cours des cinq prières quotidiennes et des prières non obligatoires.

Mais la plupart des islamologues notent que la formule était déjà un cri de guerre du temps de Mahomet qui l’aurait lui-même lancé lors de la bataille de Badr en 624. Il faut être d’une totale ignorance sur la teneur de l’islam et la personnalité de son prophète pour n’y voir qu’une réalité de religion pacifique.

Ajoutons enfin que l’expression figure sur nombre de drapeaux de pays musulmans (Irak, Iran, Afghanistan…) et aussi sur bien des armoiries et insignes militaires.

Je n’ai, pour ma part, jamais entendu clamer « Allah Akbar » dans quelque liturgie ou rassemblement de chrétiens orientaux, que ce soit à Paris, au Liban, en Israël, en Jordanie, en Irak et cela n’est mentionné dans aucun ouvrage. Et, d’ailleurs, cela ne serait pas toléré par quelque islam que ce soit, sunnite ou chiite, islamiste ou dit modéré. Car leur Allah n’est évidemment pas le Dieu trinitaire des chrétiens, tous coupables de l’impardonnable péché d’associationnisme.

 

§     Réalités palestiniennes, quelques rappels

Arabes contre Palestiniens : depuis 1943, tout n’est pas noir d’un côté, tout n’est pas blanc de l’autre, mais l’abomination du pogrom du 7 octobre par le Hamas a été mûrement calculée pour provoquer une vengeance d’Israël sans limite, avec le tapis de bombes sur Gaza, et l’isoler du monde musulman en entraînant la fin des « accords d’Abraham » par les immenses manifestations de la « rue arabe ».

Pour comprendre comment on en est arrivé à l’actuelle guerre du Hamas contre Israël – avec déjà ses premiers prolongements en Cisjordanie et les nouveaux affrontements sur la frontière nord de l’État hébreu avec le Hezbollah irano-libanais – il faut remonter à l’indépendance proclamée le 14 mai 1948 par David Ben Gourion.

C’était là, à la fois, un aboutissement et un début :

- aboutissement de l’entreprise du sionisme – néologisme forgé par le penseur et écrivain juif autrichien Nathan Brinbaum, éditeur du premier journal sioniste L’Auto-émancipation, rallié à Théodor Herzl, le père fondateur du sionisme (cf notre ouvrage : Histoire des juifs d’Abraham à nos jours). Le sionisme étant à l’origine un mouvement laïque et nationaliste fortement inspiré des modèles nationalistes européens, à visée d’implantation en Palestine d’un État national juif.

- début de la vie jusqu’à nos jours de ce nouvel État marqué par son accouchement difficile, d’une part dans l’hostilité des habitants de la Palestine (rôle du grand mufti de Jérusalem, Hadj Amin el-Husseini, futur allié d’Hitler, création en 1943 de deux divisions SS bosniaques, le seul des grands « collaborateurs » du nazisme à demeurer libre, non pourchassé après 1947 et non poursuivi par le Tribunal de Nuremberg, en raison de sa popularité dans le monde arabo-musulman) ; de l’autre dans le contexte de l’action de groupes terroristes juifs contre la puissance mandataire britannique ou contre les milices arabes. Rappelons l’Irgoun faisant sauter, le 22 juillet 1946, à Jérusalem, l’hôtel King David, QG britannique en Palestine (95 morts) ; ou encore les groupes Stern et Lehi, responsables du massacre d’une centaine d’Arabes à Deir Yassin, le 10 avril 1948, entraînant en réplique le 13 mai 1948, celui des défenseurs juifs d’un des quatre kibboutz du Goush Etzion (131 combattants massacrés dont 21 femmes, 4 survivants).

 

§     Le comportement des organisations de réfugiés palestiniens au Liban

La création de l’État d’Israël a jeté dans l’exil, dans les années 1948 et suivantes, des centaines de milliers de Palestiniens, réfugiés en grand nombre en Jordanie, en Syrie et au Liban où ils seront très vite plus de quatre cent mille, très majoritairement des sunnites. Dans ce pays, à cette époque encore largement peuplé de chrétiens, ils seront le plus souvent bien accueillis grâce, notamment, aux organisations caritatives des catholiques maronites ou des autres confessions chrétiennes.

Mais, au fil des années, ces réfugiés vont être de plus en plus encadrés par des organisations palestiniennes armées au but proclamé de reconquête de la Palestine occupée. Très vite, les Libanais et autres observateurs se demanderont s’il ne s’agit pas surtout d’une entreprise de conquête islamo-palestinienne du Liban. Cela se précisera le 3 novembre 1969, lorsqu’un accord du Caire entre États arabes imposera au Liban la présence de forces armées palestiniennes sur son territoire. Ce sera principalement le fait de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) qui avait été créée le 28 mai 1947 à Jérusalem (pas encore conquise par Israël) et qui fédérait plusieurs mouvements dont le Fatah, le Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) et le Front Démocratique pour la Libération de la Palestine (FDLP).

Ces organisations se conduisent alors au Liban comme en terre conquise, à tel point que le chef d’état-major de l’armée libanaise sera un jour arrêté à un barrage de miliciens palestiniens. Les « réfugiés » palestiniens au Liban se transformeront alors en occupants. De là, en 1975, l’éclatement de la guerre du Liban avec tous ses rebondissements jusqu’en 1996 mais, à vrai dire, conflit jamais vraiment terminé.

Rappelons au moins ici les massacres d’un millier de chrétiens assiégés dans la ville de Damour, à 20 kilomètres au sud de Beyrouth. Les Palestiniens l’avaient encerclée en coupant tout approvisionnement d’eau, d’électricité et de nourriture et en refusant tout accès à la Croix-Rouge. Par centaines les corps des chrétiens atrocement massacrés furent démembrés et les tombes du vieux cimetière chrétien de Damour systématiquement profanées.

Rappelons encore que le siège et les massacres avaient été principalement menés par le colonel Saïd al-Mouragha, surnommée « Abou Moussa », un haut-commandant de l’OLP et du Fatah. Mais, auprès de lui, agissait Zouhir Mohsen, patron de la Saiqa, milice palestinienne basée à Damas et sous les ordres de l’armée syrienne. Ses atrocités lui valurent d’être qualifiée, au Liban, de « boucher de Damour ».

Souvenons-nous encore de ce que l’on qualifiait alors les terroristes palestiniens dans nos médias de gauche – et en premier Le Monde – « d’islamo-progressistes ». Ils étaient largement dépendants et aux ordres de l’Union soviétique, comme aujourd’hui les miliciens du Hamas et du Hezbollah le sont de la République islamique d’Iran, grande alliée de la Russie poutinienne.

 

§     Glorification abortive macronienne : l’IVG dans la Constitution dès 2024

C’est, nous disent les médias, le souhait de Macron afin que « la liberté des femmes d’y recourir soit irréversible ». On voit mal pourtant ce qui empêche les femmes d’y recourir.

La vérité, surtout, c’est que notre triste président entend se glorifier d’une pareille mesure de culture de mort au mépris du Décalogue, en allant plus loin encore que Simone Weil qui, elle, ne considérant l’avortement que comme « un moindre mal », le voyait tout de même comme un mal.

Notons que Marine Le Pen n’avait pas attendu que soit précisée l’année de la « constitutionnalisation » de la liberté de suppression de vie de l’enfant à naître, que l’on peut encore désigner comme la suppression du droit de naître, pour approuver pareille mesure. C’est dommage. Car si, sur d’autres points, nous approuvons ses positions et propositions, son alignement sur la sacralisation constitutionnelle macronienne du droit au meurtre de l’enfant à naître, nous interdira de le faire.

Nous ne pourrons donc voter et appeler à voter, aux prochaines élections présidentielles, que pour une personne affirmant pour le moins son respect de la liberté de la femme de choisir la vie pour l’enfant conçu. Et d’inscrire cela dans la Constitution.

 

§     « Carpet bombing » (sic) : ces commentateurs adeptes de la langue « globish » qui bafouent l’héritage de l’édit de Villers-Cotterêts

Comme un personnage nocif ne l’est pas toujours en toutes choses, reconnaissons à l’abortophile Macron le fait plutôt positif de la création d’une « cité internationale de la langue française », simultanément « cité internationale de la francophonie ». Cela contribuera-t-il à la défense de la langue française ? On voudrait le croire. Il y aurait en effet beaucoup à faire pour cela.

J’ai, par exemple, noté que d’anciens officiers supérieurs de l’armée française, commentant les bombardements de Gaza, employaient l’expression américaine de « carpet bombing ». Cela fait savant ! Pourquoi ne pas tout simplement parler en français de « tapis de bombes » ?

 

§     Normal, non ? « En Russie, l’éternel retour de Satline »

C’est le titre, ce lundi 30 octobre, de l’article d’Alain Barluet, de la page « Enquête » du Figaro. En exergue, cet extrait : « Sur fond de guerre en Ukraine, la figure du dictateur est en pleine réhabilitation éclipsant sa responsabilité dans la répression qui a fait des millions de victimes dont la mémoire est honorée ce 30 octobre ».

Hélas, après la dissolution par le régime de Poutine, en décembre 2021, de l’organisation Mémorial, cette mémoire des plus de trente millions de victimes du stalinisme, selon Soljenitsyne, ne peut être célébrée au grand jour en Russie mais plus ou moins clandestinement selon les régions.

En revanche, Barluet rapporte que c’est près du hameau de Mednoïe, dans l’ouest de la Russie, qu’a été installée en septembre dernier une statue du dictateur, incroyablement en un lieu de mémoire où furent exécutés 6 295 prisonniers polonais, officiers, policiers et gendarmes, un des sites de l’atroce massacre de Katyn où furent exterminés au total 22 000 officiers polonais.

Et voilà que, précisément, c’est en cet endroit où est encore un musée des victimes de la Grande Terreur des années 1937-1938 (750 000 exécutions à travers la Russie) que l’on a placé non seulement un grand buste du « petit père des peuples » mais des statues d’autres dirigeants bolcheviques et notamment celle de Felix Dzerjinsky, fondateur de la Tchéka (précurseur du GPU, du NKVD, du KGB et de l’actuel FSB), mis en place par Lénine, et l’organisateur de la Terreur Rouge des années 1920.

C’est à l’approche du 30 octobre que le directeur du musée de Mednoïe a essayé de se justifier en arguant de ce que la mise en place du buste du tyran s’inscrit dans la continuité de l’exposition intérieure permanente où figure déjà « un portrait de Staline sans que cela gêne personne ». Mais, écrit Barluet, cela n’a pas apaisé les esprits : « il y des gens qui disent : cela fait partie de l’histoire ! Staline est le produit de son époque. Mais, trouve-t-on une statue de Rudolph Höss, le commandant d’Auschwitz à l’entrée du camp ? » s’indigne-t-on sur Telegram.

Le grand historien Pierre Chaunu évoquait le couple Staline-Hitler comme celui de monstrueux jumeaux hétérozygotes.

Le drame aujourd’hui c’est que sous le fallacieux prétexte qu’il a combattu Hitler, Poutine rétablit le culte de Staline.

Mais cela, à l’évidence, ne gêne pas les poutinophiles et poutinolâtres, quelquefois néo-païens et quelquefois intégristes catholiques, les uns et les autres logiquement adeptes de l’idéologie eurasiste, de l’amitié avec Xi Jinping et Kim Jong Un et avec les Iraniens manipulateurs du Hamas et du Hezbollah.

Faire remarquer cela ne justifie pas d’oublier les formidables erreurs d’Israël qui a trop longtemps cru bon de jouer la carte du Hamas contre l’Autorité palestinienne ; ni de laisser les colons des occupations de Cisjordanie se livrer trop souvent aux pires exactions-provocations contre des Palestiniens dans leur droit.

Il n’est que temps pour les dirigeants du monde de permettre enfin sur la Terre Sainte la mise en place de deux États indépendants et souverains. « Et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté ».

 

(1) Dominique Urvoy, Histoire de la pensée arabe et islamique, Paris, Seuil 2006