Mon tropisme irlandais, bien que nuancé par mon admiration
pour Kipling et le fait que je regarde en boucle Les Trois Lanciers du
Bengale, ne fait pas de moi un inconditionnel de l'Angleterre. Reste que
mon tropisme royaliste, nuancé par rien celui-là, m'a tenu pendant dix jours
aux côtés d'un peuple qui accompagnait son monarque en sa dernière demeure. En
attendant d'accompagner son roi aux cérémonies du sacre.
On a parlé de « funérailles historiques ». Le mot
n'est pas trop fort. J'ai même entendu des journalistes (c'est dire...) de TF1
à CNews en passant par BFMTV, LCI, France 2, déclarer : « L'Histoire
s'écrit sous nos yeux ». L'un d'entre eux, saisi par l'émotion, célébrera
même « la magie de la monarchie ».
Pendant dix jours, le monde – des milliards de
téléspectateurs – a vu un peuple immense rassemblé. Pacifiquement. En France,
on a le Stade de France où les racailles font la loi. Avec une police qui les
laisse impunément aller à la dépouille (et je vous donne rendez-vous aux JO de
2024...). En Grande-Bretagne, des centaines de milliers de gens dans les rues
et pas un incident à déplorer. Et une police présente, certes, mais pour
canaliser tranquillement ces flux incessants de monarchistes. Oui : des
monarchistes. Et qui savent – il n'était que d'écouter leurs interviews – le
secret et le sacré de la monarchie : le roi est mort (en l’occurrence la
reine), vive le roi ! Des monarchistes qui ont chanté en chœur et à plein
cœur, au coude à coude, à l'unisson, comme des frères d'armes et d'âmes, le God
Save the King (adapté, Bernard Antony l'a rappelé, d'une composition
française qui célébrait Louis XIV tiré d'une méchante aventure médicale).
Voilà pour les Britanniques. Mais les Frenchies n'ont
pas été en reste. Comme sortis d'une longue lobotomie républicaine, ils ont
instinctivement senti, avant de mettre des mots sur ce qu'ils (re)découvraient,
qu'il est des lieux où souffle l'Esprit. Tous n'ont pas forcément formulé la
chose en ces termes. Mais tous ont compris qu'il se passait quelque chose qui
les dépassait, les hissait, les tirait vers le haut. Vers le Très-Haut.
Beaucoup auront pu faire la différence entre un monarque et
des gougnafiers comme Macron et sa dame, les Thénardier du bling-bling,
lunettes noires chaussées sur les yeux, en baskets (de luxe, mais néanmoins des
baskets), déambulant dans Londres – au prétexte d'aller rendre hommage au
catafalque royal – comme des touristes sur le port de Saint-Trop (on a échappé
à leur arrivée en jet-ski sur la Tamise).
Sur BFMTV, la journaliste Ashley Chevalier, manifestement
tenaillée par l'émotion, a bien résumé ce qu'ont pu ressentir des millions de
Français orphelins de leur roi depuis trop longtemps, livrés qu'ils sont aux
caquètements de la zapette républicaine : « Même si on n'a pas
d'attaches particulières avec la famille royale, ce que nous sommes en train de
vivre me remue, mais pas seulement moi, tous les journalistes, c'est comme si
on était tous anesthésiés ». Pas anesthésiés, mademoiselle, mais
enfin réveillés...
Pendant dix jours, la tambouille républicaines est passée au
second plan. Pour laisser la place à la sacralité. Ce qui n'existe pas face à
ce qui dure. A Westminster, la Première ministre britannique, Elizabeth Tuss a
lu les psaumes. Dieu premier servi. En France, je suis persuadé que ces
journées historiques ont rappelé nos saints et nos rois à la mémoire de nos
compatriotes. Que saint Georges et saint Michel accompagnent et prolongent ces
retrouvailles !
Alain Sanders