samedi 28 mars 2020

Retour au réel


La réalité de la mort
Après les immenses hécatombes des deux grandes guerres mondiales, notre monde moderne – entendons pas là le monde occidental – pourra être analysé comme celui d’une constante tentative de faire oublier, par tous les moyens, la plus certaine, pourtant, des réalités : la mort inéluctable de tous les êtres vivants, la mort qui nous attend tous.
Certes, entre les deux grands conflits mondiaux et après, jusqu’à nos jours, il n’y a jamais eu de paix universelle et c’est encore par dizaines de millions de morts que peut s’établir le bilan des centaines d’affrontements, plus ou moins limités, plus ou moins durables qui ont frappé presque tous les peuples. Sans oublier les exterminations, jusqu’à nos jours aussi, dans les enfers des goulags et du laogaï et autres systèmes de déshumanisation ; et encore les massacres et atrocités des régimes et des mouvements de l’islam jihadiste. Sans oublier, non plus, le meurtre en continu, par millions, chaque année, dans le monde, des enfants privés du droit à la vie.
Mais, nonobstant tout cela, le monde moderne, le monde occidental, est comme celui d’une immense conjuration pour détourner l’homme du réel et en premier, de la réalité de la mort : par tous les moyens conjugués des médias, de l'anti-culture, des drogues de toutes sortes, du conditionnement néo-totalitaire, en deux mots, le meilleur des mondes.
Un des premiers effets de l’irruption radicalement perturbatrice du coronavirus, quasiment dans presque toute la vie du monde, est, semble-t-il, d’établir pour le plus grand nombre une vie à la fois de confinement et de pénétration très partielle du monde extérieur par la constante intrusion médiatique.
Or, grâce aux bons offices du ministère de la Santé incarné par monsieur Salomon, vigilant comme un métronome et relayé par tous les présentateurs des chaînes audio-visuelles, voilà que les journées des citoyens sont désormais rythmées par les annonces et statistiques du nombre des morts entraînées par l’impitoyable virus.
Toutes choses inégales par ailleurs, nous voici revenus aux temps des grandes épidémies où de courageux ramasseurs les entassaient sur leurs charrettes et comptaient les cadavres.
Bref, la mort n’est plus dissimulée, cachée, évacuée, une chose qu’il était malséant d’aborder.

Les flegmatiques et les apocalyptiques
Je reviens sur l’observation que j’ai faite des différentes attitudes face aux ravages de l’épidémie. Je demeure sur la certitude que n’étant ni épidémiologue, ni prophète, je n’ai pas de compétence pour les commenter personnellement.
À certains, j’objecterais donc simplement qu’il ne me paraît pas juste de comparer les chiffres d’une épidémie en cours à ceux, plus élevés, d’épidémies passées. Attendons que celle-ci soit terminée pour la mesurer valablement à l’aune des précédentes.
D’autant que, me dit ma filleule libanaise, Mouna, docteur en nano-technologies, le corona, extrêmement mutant, n’est pas partout le même et ses méfaits seront donc différents. Ne voilà-t-il pas que les microbes (pour moi, ignare, virus ou microbe, c’est du même tabac !) adopteraient le principe de nationalité !
Pour les apocalyptiques, rien ne dit que la pandémie va finir. Et, pour certains, c’est le début du commencement de la fin du monde.
Mais je suis sceptique. Certes, il y aura une fin du monde mais elle a été si souvent annoncée qu’il se pourrait bien, encore une fois, que ce ne soit pas la bonne.

Réalité catholique
On le sait, je ne suis pas un grand admirateur du successeur de Benoît XVI, étant catholiquement totalement libre de ne pas le considérer infaillible en tout ce qui ne relève pas de son Infaillibilité pontificale.
Je ne développerai pas cela aujourd’hui. Mais je lui sais gré d’avoir, hier, à Saint-Pierre de Rome, permis un grand moment de retour à la réalité de l’Église catholique, par les chants d’adoration et de salut du Saint-Sacrement, donnés par quelques chanteurs de la chapelle Sixtine. Sublime beauté que celle de ces chants à Dieu du Parce Domine, de l’Adoro Te devote, du Tantum ergo aux paroles écrites par saint Thomas d’Aquin. Cela change des niaiseries trop souvent diffusées sur les chaines catholiques.
Dans la page Opinions du Figaro de ce jour, on lit le très bel article de Mathieu Bock-Côté : Au milieu du désastre, la foi.
Une réflexion sur la mort, véritablement sacrificielle, d’une vingtaine de prêtres de Bergame et de la région, ayant choisi de demeurer parmi les malades pour les accompagner d’une dernière prière.
C’est cela aussi, et surtout, l’Église catholique.