Tous ces jours-ci, un seul
sujet politique, dans les medias : la mort de Jacques Chirac.
Nous ne nous associons pas au
concert d’unanimité dans la louange.
Oh certes, le personnage, on
nous le rabâche, était si humain, si sympathique, avec son goût si émouvant,
sans cesse évoqué, pour la tête de veau et la bière à grandes lampées, son plaisir
à taper en connaisseur de l’élevage et
de l’agriculture sur les culs des vaches et à se délecter au spectacle de ceux
des sumotoris.
Va pour la tête de veau, la
bière et le cul des vaches. Rien d’antipathique en effet en cela mais tout de
même pas de quoi se pâmer nostalgiquement.
Va pour les sumotoris, encore
qu’en matière de connaissance du Japon, Chirac, qui n’en parlait pas la langue
ni n’en dessinait les caractères, n’arrivait pas à la cheville de notre ami
Bruno Gollnisch, lui si admiré dans toute la classe politique et culturelle
japonaise pour la qualité de son parler et de son érudition authentique.
Mais Chirac ne daigna jamais
inviter Bruno Gollnisch et son épouse japonaise, Seïsuko, à venir prendre un
verre de saké à l’Élysée, histoire d’échanger un peu d’impressions sur leur
commune affection pour le pays du soleil levant.
Peut-être craignait-il que l’échange
ne soit par trop déséquilibré ?
Cela dit, revenons encore un
peu sur la question de l’agriculture. Chirac était certes un grand « pro »
de la déambulation au Salon. Mais en quoi défendit-il réellement la France et ses
agriculteurs dans le contexte de la PAC (Politique Agricole commune). En quoi
évita-t-il à notre agriculture les carcans planificateurs du FEDER (Fonds
Européen de Développement Régional) et
du FEOGA (Fonds Européen d’Orientation Générale Agricole) ?
En quoi évita-t-il la diminution
véritablement génocidaire du nombre de nos paysans ? En quoi s’opposa-t-il
à « cette Europe-là » ?
La vérité, c’est que sous ses
apparences sympathiques de fort en gueule, genre personnage de Maupassant, l’orientation
de sa politique agricole ne fut essentiellement que celle dictée par la
technocratie bruxelloise.
Sur le plan de sa politique
étrangère, nous lui reconnaissons comme beaucoup d’autres au moins une chose,
hélas une seule : le mérite de n’avoir pas suivi le gouvernement américain
dans la folie criminelle de la guerre du Golfe, à propos de l’Irak et du Koweït,
dont le monde ne finit pas de payer les conséquences.
En revanche, comment oublier sa
politique non pas simplement réaliste mais de complaisance idéologique avec le
communisme ? Qui évoque aujourd’hui dans les medias, avec les termes
appropriés, son indécente réception le 24 octobre 1999 du dictateur chinois
Jiang Zemin ? La veille de l’accueil grandiose qu’il allait lui réserver à
Paris, il avait tenu à l’accueillir fastueusement, chez lui, en son château de
Bity, en Corrèze (admirablement géré sur le plan fiscal…). Et l’on peut
aisément trouver sur internet (video ina.fr) le film de Bernadette dansant
quelque bourrée avec le successeur de Mao et maître du Laogaï sous l’œil attendri
de son châtelain de mari.
Mais il y a un souvenir, bien
plus honteux, bien plus atroce qui, depuis le 20 avril 1975, ne quitte pas
notre amie cambodgienne Billon Ung Boun-Hor. Ce jour-là, Valéry Giscard d’Estaing
étant président de la République et Jacques Chirac premier ministre, dans notre
ambassade à Pnom-Penh s’était réfugié le président de l’Assemblée Nationale du
Cambodge, Ung Boun-Hor, grand ami de la France.
Les khmers rouges, qui
commençaient à perpétrer l’immense génocide que l’on sait (deux millions de
morts soit la moitié de la population du Cambodge), exigèrent que ce dernier
leur soit livré. Et ce fut sur l’ordre de Jacques Chirac que les gendarmes
français de l’ambassade commirent la déshonorante ignominie de coopération à un
crime contre l’humanité, s’en saisissant pour le livrer à ses bourreaux. On peut
revoir aussi cette scène atroce sur internet. Rien n’imposait au gouvernement
français de Jacques Chirac d’imposer à nos gendarmes de faire ce pourquoi les
bourreaux n’avaient pas besoin d’eux !
Jacques Chirac, ce fut encore
celui qui décida de l’incroyable mesure - il fallait y penser ! – d’accorder
aux anciens des Brigades internationales en Espagne les droits des anciens
combattants français. On sait ce que furent ces Brigades, dirigées par le
communiste français André Marty, appelé alors « le boucher d’Albacète ».
Quand la naïve philosophe
Simone Weil, qui s’y était engagée idéalistement en découvrit la réalité, elle put
alors à grand peine en partir et témoigner ensuite de l’abomination. Chirac s’illustra
encore, après celle de Jian Zemin, dans la réception grandiose à Paris du
criminel de guerre viêt-cong Lê Kha Phieu, (l’ordonnateur des massacres de Huê
en 1968 avec ses trois mille victimes dont plusieurs centaines enterrées vivantes).
Chirac, ce fut encore son
abject déroulement de tapis sous les pieds de Bouteflika, le fellagha
sanguinaire. Et enfin, comment oublier que ce fut ce président de la République
française qui alla assister aux obsèques du dictateur syrien Hafez el Assad,
sur les ordres duquel furent assassinés au Liban nos paras du Drakar, notre
ambassadeur Delamarre et notre attaché militaire, le colonel Gouttières.
Chirac enfin, cosignataire avec
Giscard d’Estaing et Simone Veil de la loi en faveur de l’avortement, c’était
le chef de l’État qui martelait : « il ne peut y avoir de lois « religieuses » au-dessus des lois
de la République ».
Par « lois religieuses »,
il n’entendait à l’évidence pas les lois particulières propres aux religions mais
la loi morale naturelle, celle du Décalogue, celles du respect de la vie
innocente.
Le fait qu’il était
certainement sous certains angles un brave type ne saurait faire oublier ce qui
précède.
Quoi qu’il en soit, là où peut
désormais être son âme, ce ne sont plus les lois de la République qui
gouvernent.