Chaque samedi confirme
sinon leur diminution en nombre, du moins la dispersion politique des gilets
jaunes, plutôt vers la gauche.
Souvenons-nous :
lors des premiers défilés hebdomadaires, le ministère de l’Intérieur et les
medias attribuaient indifféremment les violences à des gilets jaunes « d’ultra-droite »
ou « d’extrême-gauche ». Ce fut notamment le cas dans les
commentaires de l’invasion de l’Arc de triomphe.
Peut-être, je ne sais, y
avait-il alors présence des militants policièrement identifiés comme d’ultra-droite.
Resterait à savoir ce que la police peut bien ranger sous cette appellation ?
À Toulouse, d’emblée,
les rassemblements de gilets jaunes ont été pénétrés par toutes les variantes
locales des extrémismes de gauche rouges et noirs, trotskystes, anarchistes et
autres antifas. Ayant repéré lors d’une des premières manifestations la présence
de militants de groupes nationalistes, ils les agressèrent, selon leur coutume,
avec la plus grande violence.
Cela eut pour effet de
dissuader ces derniers de revenir par trop visiblement les fois suivantes.
Hier I° mai, en maints
endroits, et d’abord à Paris, on a vu de nombreux porteurs de gilets jaunes
défiler parmi les brandisseurs de drapeaux rouges de la CGT.
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Il
y en a eu, a-t-on dit sur certains medias, à être plutôt en complicité avec les
« black blocs ».
Cependant, ce premier
mai aussi, le chanteur Francis Lalanne confirmait sa candidature aux élections
européennes à la tête d’une liste « Alliance jaune » se voulant « apartisane ».
Nonobstant, c’est sans
doute vers le Rassemblement National de Marine Le Pen et de Jordan Bardella que
continue à aller la sympathie de la majorité initiale des gilets jaunes. En effet,
dans les sondages, les intentions de vote pour leur liste aux « européennes »
ne diminue pas du tout mais semble même progresser.
Il est vrai que c’est de
la part d’Emmanuel Macron une délicate attention pour Marine Le Pen que d’avoir
choisi madame Loiseau comme tête de liste de sa République marcheuse. Une fois
encore, épargnons-nous une trop facile ironie.
En conclusion de ces
observations, je ne crois pas que le mouvement des gilets jaunes puisse évoluer
vers une forme politique originale. Sans doute a-t-il été l’expression d’une
exaspération profonde d’une grande masse de Français économiquement relégués et
politiquement méprisés.
Il a pu aussi
partiellement rappeler la révolte du poujadisme sous la IV° République. Mais le
poujadisme fut par essence le mouvement d’un personnage rassembleur sur sa
personne et sur la défense de valeurs patriotiques et sociales clairement
affirmées. C’était, mais ce n’était pas qu’une révolte contre le fiscalisme. Pour
faire bref, rappelons que le petit commerçant de Saint-Céré, Pierre Poujade,
avait été un combattant courageux lors de la guerre et qu’il était somme toute
un gaulliste défenseur des valeurs du Travail, de la Famille et de la Patrie.
Ces valeurs étaient
partagées jusqu’à la guerre par l’ensemble des Français, comme le rappelait notre
regretté ami, l’historien et politologue François-Georges Dreyfus, dans ses
deux ouvrages : « Histoire de Vichy » et « Histoire de la
résistance ».
La subversive déconstruction
sociétale continument perpétrée depuis mai 68 n’a sans doute pas épargné les
milieux des gilets jaunes. Outre le fait qu’il n’a pas fait surgir une
personnalité analogue à celle de Pierre Poujade, il est évident que sa cohésion
politique et sociale est bien plus improbable que celle du poujadisme, faute de
cohésion morale.
Aujourd’hui, à la
différence de certains analystes, je ne crois pas que les notions de droite et
de gauche soient obsolètes. Je crois au contraire comme l’excellent professeur
et écrivain Jean-Louis Harouël qu’elles se perpétuent et se perpétueront.
Or les gilets jaunes
sont en fait par trop traversés par ce clivage fondamental pour que leur
mouvement débouche sur une unité durable. Il n’empêche, il aura été bien utile
pour ébranler le nocif régime macronien.