mercredi 17 octobre 2018

Nouvelle « affaire des fiches » : du rififi à FO entre « anars », francs-maçons et « trotskards ». C’est vraiment Pavageau qui « la fichait mal » : il a dû démissionner !


Non, cette fois-ci ce n’est pas le ministre de la guerre qui a mobilisé toutes les loges du Grand-Orient de France pour ficher les officiers catholiques, (« les Tala », ceux qui vont à la messe), ça, c’était du temps du général Louis André de 1900 à 1904, avant que le scandale n’éclate et que ce grandiose flicard de ministre si républicain ne doive enfin démissionner.

Aujourd’hui, l’affaire est venue  du secrétaire général de la CGT-FO, Pascal Pavageau, dont certains camarades syndiqués, un peu méfiants, ont découvert qu’il avait fiché 126 responsables de la confédération avec toutes mentions utiles sur leur personnalité, leur carrière, leurs appartenances, leurs petits défauts…  

Bien sûr, l’intégralité du contenu des fiches, quelquefois sans doute un peu gênant, n’a pas été communiquée. Secret syndical exige !

Mais les « découvreurs » ont cependant révélé que figuraient des mentions telles que « niais » ou encore « franc-maçon » ; ce qui n’est d’ailleurs pas forcément incompatible, même si, à partir de certains degrés d’initiation, il doit y avoir plus d’apparatchiks malicieux que de benêts. 

Preuve en tous cas qu’il n’y a pas que des « frangins » à FO.

Ce qui nous ramène à l’histoire des origines de cette confédération créée en 1947-48 par ceux qui, derrière les dirigeants historiques non communistes et au premier chef le socialiste Jouhaud, n’acceptaient pas la prise de contrôle de la CGT par les communistes staliniens.

Leur scission s’organisa au sein d’une nouvelle confédération, la CGT-FO, véritable salmigondis de courants concurrents sinon rivaux voire ennemis : réformistes, anarchistes, socialistes et communistes trotskistes.

Parmi ces derniers se maintenait sans doute encore fortement dans le lénino-trotskisme l’hostilité communiste à la franc-maçonnerie, interdisant en 1921 la double appartenance.

Rappelons qu’après avoir édicté les « 21 conditions d’adhésion à la troisième Internationale », (l’internationale communiste), Lénine et Trotski en imposèrent une 22°, mais celle-là « non-écrite », la condamnation de cette double appartenance. Pour la raison que le parti communiste et la franc-maçonnerie étant organisés avec de respectives hiérarchies secrètes sinon clandestines, il fallait être vigilant contre toute tentative de noyautage…

Ainsi Trotski, en 1922, déclarait qu’il fallait « balayer la franc-maçonnerie avec un balai de fer » ! Même si c’est le trotskisme qui fut ensuite balayé par le stalinisme et si après la guerre, syndicalistes et francs-maçons pouvaient se retrouver « face aux cosaques » - comme on disait alors à FO. L’ancienne méfiance de ces syndicalistes souvent spécialistes des coups tordus réciproques pour le contrôle de l’appareil n’a d’évidence pas totalement disparu.

Je ne sais exactement quelle est l’écurie d’origine de Pavageau. Mais à ce qui ressort de l’affaire de ses fiches, c’est plutôt l’alliance avec les trotskistes contre les « frangins » qu’il voulait essayer de jouer pour sauver son poste.

Mais cela n’était pas évident tant il s’est mis de monde à dos, non seulement par ses positions mais aussi par sa manière autocratique de diriger. 

Si nous avons consacré ces quelques lignes aux turbulences dans la confédération Force Ouvrière, c’est que c’est parmi ses adhérents qu’il y a la plus forte proportion de partisans de ce que l’on appelle aujourd’hui le populisme, ce que nous ne trouvons pas antipathique.