Dans un entretien accordé au Figaro du 29 juin, l’inénarrable
Alain Minc donne son avis éclairé sur le Brexit : craignant visiblement
d’être largement distancé dans la course à l’européiste le plus odieux et le
plus méprisant, compétition très courue depuis le 25 juin, Minc s’est décidé à
sortir ses plus belles affirmations péremptoires, sur le ton du maître d’école
condescendant qui lui sied si bien. « Paris
et Berlin devraient aider Londres à ne pas quitter l’UE » sans tenir
aucun compte du résultat du référendum puisque « les Britanniques son en train de se rendre compte des conséquences peu
avantageuses de leur sortie de l’Union ». Ils sont si bêtes, ces
Anglais, ils n’ont toujours pas compris qu’aux yeux des eurocrates et de leurs
séides, les référendum ne devraient avoir de valeur que si leur réponse est
convenable : « nous devons nous
souvenir que, nous aussi, après le référendum de 2005, nous avons connu des
difficultés », des difficultés à violer la volonté du peuple français
sans trop se faire voir, ce que l’hypocrite Sarkozy a fini par réaliser en
faisant voter le traité de Lisbonne, honteuse photocopie de la Constitution
Européenne, par le Parlement.
Les Anglais qui ont voté le retrait de l’UE, et par
extension tous les manants qui votent mal aux yeux de Minc, sont d’autant plus
méprisables qu’ils représentent le passé honni et les classes condamnées par le
sens de l’Histoire : « Ce vote pour le Brexit, c’est la victoire de
Downton Abbey sur les bobos, les créateurs d’entreprise et surtout les jeunes.
Mais les aristocrates et la classe ouvrière n’avaient pas vu la conséquence du
Brexit, c’est-à-dire l’éclatement possible du Royaume Uni ». L’alliance
des cockneys et des Lords que dénonce Minc est exactement la conjonction des
forces réactionnaires villipendées
par les gauchistes post-soixante-huitards déplorant que les ouvriers fussent
trop traditionalistes pour faire la révolution. Cohn-Bendit ne dit pas autre
chose, libéraux et libertaires conséquents s’entendant comme larrons en foire.
Mais ce n’est au fond pas grave, nous rassure l’instituteur
Minc, ce n’est qu’une « grosse
bêtise » d’enfant entêté, réparable et pardonnable, puisque les partisans
du Brexit n’ont pas encore atteint l’âge de raison, leur victoire est celle
« des gens peu formés sur les gens
éduqués ». Comme toujours, le peuple qui vote mal, a fortiori quand il est majoritaire, est
un ramassis d’imbéciles sous-diplômés, de white
trash, de petits Blancs. On aura
constaté à quelle point cette explication par le mépris de classe le plus
abject permet de rendre compte de la réalité du vote dit
« populiste » en France comme dans les autres pays européens :
brillant succès sur toute la ligne ! Le surdiplômé Alain Minc a beau
prévoir la catastrope économique pour le Royaume Uni, « tassement des investissements » et
autres délocalisations en cascade, les faits démocratiques sont têtus, la
majorité du peuple anglais a repris, pour une fois, sa souveraineté sur une
Union Européenne de plus en plus autocrate et antidémocratique. Peut-être
vaut-il mieux un prolo sous-diplômé qui vote avec bon sens et patriotisme,
malgré l’opprobre des « élites pro-européennes », qu’un Minc
surdiplômé qui aimerait, avec force morgue, se rire de la volonté des
peuples ?
Pierre Henri