mercredi 29 juin 2016

Alain Minc sur le Brexit : sentences définitives d’un grand démocrate


Dans un entretien accordé au Figaro du 29 juin, l’inénarrable Alain Minc donne son avis éclairé sur le Brexit : craignant visiblement d’être largement distancé dans la course à l’européiste le plus odieux et le plus méprisant, compétition très courue depuis le 25 juin, Minc s’est décidé à sortir ses plus belles affirmations péremptoires, sur le ton du maître d’école condescendant qui lui sied si bien. « Paris et Berlin devraient aider Londres à ne pas quitter l’UE » sans tenir aucun compte du résultat du référendum puisque « les Britanniques son en train de se rendre compte des conséquences peu avantageuses de leur sortie de l’Union ». Ils sont si bêtes, ces Anglais, ils n’ont toujours pas compris qu’aux yeux des eurocrates et de leurs séides, les référendum ne devraient avoir de valeur que si leur réponse est convenable : « nous devons nous souvenir que, nous aussi, après le référendum de 2005, nous avons connu des difficultés », des difficultés à violer la volonté du peuple français sans trop se faire voir, ce que l’hypocrite Sarkozy a fini par réaliser en faisant voter le traité de Lisbonne, honteuse photocopie de la Constitution Européenne, par le Parlement.

Les Anglais qui ont voté le retrait de l’UE, et par extension tous les manants qui votent mal aux yeux de Minc, sont d’autant plus méprisables qu’ils représentent le passé honni et les classes condamnées par le sens de l’Histoire : « Ce vote pour le Brexit, c’est la victoire de Downton Abbey sur les bobos, les créateurs d’entreprise et surtout les jeunes. Mais les aristocrates et la classe ouvrière n’avaient pas vu la conséquence du Brexit, c’est-à-dire l’éclatement possible du Royaume Uni ». L’alliance des cockneys et des Lords que dénonce Minc est exactement la conjonction des forces réactionnaires villipendées par les gauchistes post-soixante-huitards déplorant que les ouvriers fussent trop traditionalistes pour faire la révolution. Cohn-Bendit ne dit pas autre chose, libéraux et libertaires conséquents s’entendant comme larrons en foire.

Mais ce n’est au fond pas grave, nous rassure l’instituteur Minc, ce n’est qu’une « grosse bêtise » d’enfant entêté, réparable et pardonnable, puisque les partisans du Brexit n’ont pas encore atteint l’âge de raison, leur victoire est celle « des gens peu formés sur les gens éduqués ». Comme toujours, le peuple qui vote mal, a fortiori quand il est majoritaire, est un ramassis d’imbéciles sous-diplômés, de white trash, de petits Blancs. On aura constaté à quelle point cette explication par le mépris de classe le plus abject permet de rendre compte de la réalité du vote dit « populiste » en France comme dans les autres pays européens : brillant succès sur toute la ligne ! Le surdiplômé Alain Minc a beau prévoir la catastrope économique pour le Royaume Uni, « tassement des investissements » et autres délocalisations en cascade, les faits démocratiques sont têtus, la majorité du peuple anglais a repris, pour une fois, sa souveraineté sur une Union Européenne de plus en plus autocrate et antidémocratique. Peut-être vaut-il mieux un prolo sous-diplômé qui vote avec bon sens et patriotisme, malgré l’opprobre des « élites pro-européennes », qu’un Minc surdiplômé qui aimerait, avec force morgue, se rire de la volonté des peuples ?

Pierre Henri