Bernard Antony, président de Chrétienté-Solidarité, communique :
1) Sur le principe on ne
saurait reprocher à un pape de rencontrer un chef d’État quel qu’il soit,
fût-il un triste personnage. L’histoire de l’Église est pleine de ces
rencontres.
C’est au Souverain Pontife et à lui seul de toujours décider finalement de l’opportunité
d’entretiens au plus haut niveau dont il faut croire qu’ils sont dans l’intérêt
de l’Église et des fidèles et quelquefois on l’imagine aisément, pour des
raisons connues de lui seul.
2) En revanche, il n’est
pas interdit aux fidèles de porter des jugements approbatifs ou interrogatifs
voire de douloureuse incompréhension sur le déroulement de ces rencontres, sur
des propos et des gestes surprenants.
Aussi, dans le contexte
de cette Église qui depuis le concile Vatican II s’affirme pour la promotion du
laïcat et toujours plus porteuse de démocratie et de libre débat, n’est pas pour
le moins contradictoire d’inviter les fidèles, comme le font certains clercs,
à une inconditionnelle soumission aux paroles et gestes du pape ?
3) Pour ce qui est de
Fidel Castro, fallait-il donc que François, arrivant à La Havane, prie son
frère Raoul, qui lui a succédé comme dictateur, de lui transmettre son
« respect » ?
Le terme de
« considération » sans autre précision, n’aurait-il pas suffi ?
Était-il bien nécessaire
pour le pape de sans cesse citer aussi à son arrivée, le « poète »
révolutionnaire du XIXe siècle José Marti, annexé et instrumentalisé
par ce Fidel Castro qui laissa croupir en prison vingt-deux ans durant, dans
des conditions affreuses, le grand poète Armando Valladarès ? Ce dernier
pourtant avait été un de ses compagnons de la révolution de 1959. Mais il
refusait son détournement marxiste-léniniste par Fidel Castro et par son
camarade néo-trotskiste, Ernesto Guevara, le futur « Che », sadique
tortionnaire et fusilleur, à la légende romantique totalement fabriquée.
4) Il faut bien sûr
souhaiter qu’outre les échanges d’amabilité de circonstance, les conversations
entre les frères Castro et le pape aient pu porter sur le sort fait aux
courageuses personnes arrêtées ce dimanche 20 septembre pour avoir voulu lui
parler ou pour avoir protesté contre la continuation liberticide du régime par
le cri de « libertad » !
Il faut bien sûr espérer
que, comme le titrent certains médias, le pape ne soit pas venu pour être
agréablement « au chevet d’un régime à bout de souffle ».
5) S’adressant aux
jeunes le dimanche soir, François a dénoncé « les lectures partielles ou
idéologiques » qui ne sont pas « utiles » parce que
« épousant nos petits schémas préconçus », « déformant la
réalité » et « conduisant à l’exclusion ». Certains ont relevé
un aspect plutôt sibyllin dans ces propos. Par le « nos petits schémas
préconçus », il semble en effet qu’il ne se mettait pas tellement en cause
lui-même mais utilisait plutôt un procédé de mise en cause plus
collective ? Mais de qui ?
6) Quoi qu’il en soit,
de même que l’Église catholique a su avec Jean-Paul II procéder à ses propres
nécessaires repentances, la « culture du dialogue » prônée par
François ne saurait être assimilée à Cuba ni ailleurs à une volonté surprenante
d’amnésie des crimes du communisme. Car le pardon ne peut passer que par la
reconnaissance de la vérité.
7) La réalité de la
dictature communiste castriste à Cuba ce fut en effet notamment ceci, sur quoi
on trouvera plus de précisions dans « Le livre noir du
communisme » :
- dès 1959, l’abolition
d’élections libres et de la liberté d’association,
- à partir de 1960,
l’élimination des principaux cadres non communistes de la révolution,
contraints à l’exil ou fusillés par centaines,
- en 1962 la fermeture
de tous les collèges catholiques et l’expulsion de 131 prêtres et religieux,
- dans les années
60 : l’ouverture de l’UMAP (Unité Militaire d’Aide à la Production), le
goulag cubain ; trente mille prisonniers politiques, dix milles
fusillés ; les tortures systématiques menées par le « Departemento
Tecnico de Investigaciones » ; la détention dans les
« tostadoras » (grille-pains) où l’on entassait des prisonniers dans
une chaleur infernale à cinq pour une place, et d’autres dans les « cages
de fer » sur le modèle de celles des « tchékas » mises en place
pendant la guerre civile espagnole par le sadique Guenrikh Yagoda (le chef du
NKVD de Staline).
- l’expédition en Angola
d’une armée de cinquante mille hommes pour aider le régime communiste à
affronter les combattants de la liberté de Jonas Savimbi et terroriser les
populations
- l’envoi de
« conseillers » au Nicaragua sandiniste pour massacrer les indiens
miskitos et les campesinos refusant l’embrigadement et la collectivisation.
Bilan total du régime de
Fidel Castro :
- une constante jusqu’à
nos jours de 12 à 15 000 prisonniers politiques,
- 17 000 fusillés,
- 2 millions d’exilés,
L’histoire dira si le
pape François aura contribué ou non à la fin de cette dictature totalitaire
latino-bolchevique, bien pire que celle du général Péron pour laquelle il eut
l’enthousiasme de la jeunesse.