vendredi 6 juin 2014

Flèches d’actualités



- Le débarquement en Normandie.

Soixante-dix ans déjà. Mon âge !

Des années après, la Providence fera qu’une longue et fervente amitié, jusqu’à leur mort, me liera à des héros de cette journée :

- Et d’abord au docteur Jean-Jacques Plat que j’ai déjà quelquefois évoqué et qui fut l’un des tous premiers à m’aider pour lancer et faire vivre le mensuel Présent sans lequel le quotidien auquel j’ai apporté, avec mon énergie, son titre et le fichier de ses 3000 abonnés n’aurait pas vu le jour.

Jean-Jacques plat, médecin anesthésiste à Castres, était un homme de nature très discrète, flegmatique, tout ce qu’il fallait pour être le saboteur efficace qu’il fut. La liste de ses décorations suffit à évoquer sa prestigieuse épopée personnelle de 1940 à 1945 : Médaille militaire ; Croix de guerre française ; Croix de guerre néerlandaise ; Médaille des évadés ; Médaille des combattants volontaires de la Résistance.

Ayant rejoint l’Angleterre et les SAS des forces françaises libres, il fut parmi les premiers parachutistes français largués en Normandie avant même le débarquement pour des opérations de sabotage des communications allemandes.

Jean-Jacques avait accepté d’être deuxième après moi sur la liste du Front National que j’avais constituée à Castres dans les années 1986. Seul élu, je démissionnai pour lui laisser la place. Ses interventions étaient rares, toujours teintées de son humour délicieux. Il était évidemment respecté, surtout par le maire et ancien ministre Jacques Limouzy qui était mon adversaire politique mais aussi un très bon ami car il ne manifesta jamais aucune venimeuse aversion contre le Front National, accueillant avec moi dans sa mairie Jean-Marie Le Pen, et une autre fois Marie-France Stirbois qu’il aidait volontiers de ses conseils techniques lorsqu’elle était le seule députée du FN.

Limouzy, dans cette ligne, voulut donc un jour honorer son prestigieux conseiller municipal à qui il ne faisait qu’un reproche : celui d’être trop discret, trop humble. Il fit préparer un beau coquetaile, exprima son admiration pour le docteur et lui donna la parole. Jean-Jacques bougonna puis, comme se jetant à l’eau sans trop savoir nager, il parla : moins d’une minute. Et pour dire qu’étant donné ce qu’il voyait de l’état de la France, des trahisons et des abandons qui en avait marqué l’évolution depuis 1945, il se demandait quelquefois s’il n’aurait pas mieux fait de ne pas s’agiter pour rien (sic !) pendant la guerre.

Bien sûr, il ne regrettait rien, mais répugnant à toute expression de fierté, c’était sa manière, sous l’élégance de l’auto-dérision, de ne surtout pas se vanter de quoi que ce soit. Jacques Limouzy pestait avec raison de n’avoir pu davantage le faire parler. Car il tenait à ce que  les jeunes de sa ville sachent que la Résistance avait d’abord été le fait d’hommes de droite et de héros comme Plat tandis que le parti communiste approuvait l’alliance de Staline et d’Hitler et leur dépeçage de la Pologne.

- À la même époque, grâce à Jean-Marie Le Pen, je fis la connaissance d’un homme également fantastique, qui fut de notre groupe d’élus à Strasbourg, l’ancien ambassadeur de France à Londres, le compagnon de la libération Michel de Camaret.

Michel est le héros central du célèbre film « Bataillon du ciel ». Lui aussi avait été parachuté en Normandie, pour effectuer dans la zone du maquis de Saint-Marcel (celui du jeune Le Pen) de délicates opérations nécessitant de savoir manier correctement les cordons « bickford » et les explosifs. Il ressemblait étonnamment à Plat, pas plus grand, aussi mince, aussi flegmatique, mais naturellement, lorsque nécessaire, parlant davantage car, après avoir été un brillant officier continuant la guerre de 1940 en Indochine, il avait fait une brillante carrière de diplomate, à la suite de quoi il rejoignait sans cesse tous les fronts des résistances anti-communistes ou chrétiennes, de l’Indochine au Liban. Allant même, quoique sexagénaire, crapahuter en Afghanistan avec les hommes du commandant Massoud, plus tard assassiné par les islamistes.

Michel de Camaret, jusqu’à sa mort, fut un grand fervent de Chrétienté-Solidarité.

- Mais je veux, aujourd’hui, absolument évoquer encore deux des personnages qui, durant des années, se retrouvaient avec Jean-Jacques en un incomparable trio d’Amitié Française, pour mettre sous enveloppe Présent, ce que notre petit imprimeur ne faisait pas.

C’était André Cohen qui, lui, ayant gagné la Tunisie pendant la guerre, avait fait le débarquement en Italie avec l’armée du Maréchal Juin.

Fils de rabbin, ardemment converti au catholicisme, André était exaspéré par le « résistancialisme » des résistants de la treizième heure et aussi par toute l’injustice faite selon lui au Maréchal Pétain sur lequel il avait à peu près le même jugement plutôt positif que notre regretté ami le professeur François-Georges Dreyfus ou la grande journaliste Annie Kriegel.

Le troisième du trio était Noël Sage. Lui, catholique fervent, tout aussi patriote que les deux premiers, tout aussi enclin sans hésiter à mettre sa peau au bout de ses idées, avait été persuadé que le plus grand danger pour l’Europe, plus encore que le nazisme, était le communisme. Il s’était donc engagé dans la LVF et la division Charlemagne et s’était battu courageusement sur le front de l’Est, où il avait constaté la triste réalité du nazisme qu’il n’avait pas perçue dans son enthousiasme juvénile.

Noël, fait prisonnier en 1944 par les soviétiques, fut de ceux qu’ils préférèrent alors, plutôt que de les tuer, envoyer dans les camps de travail pour pallier leur besoin urgent de main d’œuvre. Il paya durement le fait de n’avoir pas choisi le bon camp, mais l’extraordinaire, c’est qu’il fut, après dix ans de travaux forcés, de la poignée de survivants que, sous la IV° République, la Croix-Rouge française put alors admirablement récupérer, ce qu’elle ne put jamais faire sous la V° pour nos milliers de compatriotes d’Algérie horriblement enlevés et détenus en Algérie.

Ainsi, oui, je pense souvent à ces trois merveilleux amis, et qui s’aimaient tellement parce que de même trempe d’homme, de même humilité, de même humour, même foi patriotique et catholique : Jean-Jacques, le SAS de la France Libre, Noël l’ancien SS de la Charlemagne et André, le fils du rabbin, de l’armée d’Afrique, tous trois jusqu’au bout dans la même ferveur d’Amitié Française et Chrétienne et qui ont œuvré avec moi pour notre mensuel Présent et la naissance du quotidien auquel j’ai pour le moins apporté son titre…