- Le débarquement en Normandie.
Soixante-dix
ans déjà. Mon âge !
Des
années après, la Providence fera qu’une longue et fervente amitié, jusqu’à leur
mort, me liera à des héros de cette journée :
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Et d’abord au docteur Jean-Jacques Plat que j’ai déjà quelquefois évoqué
et qui fut l’un des tous premiers à m’aider pour lancer et faire vivre le
mensuel Présent sans lequel le quotidien auquel j’ai apporté, avec mon énergie,
son titre et le fichier de ses 3000 abonnés n’aurait pas vu le jour.
Jean-Jacques
plat, médecin anesthésiste à Castres, était un homme de nature très discrète,
flegmatique, tout ce qu’il fallait pour être le saboteur efficace qu’il fut. La
liste de ses décorations suffit à évoquer sa prestigieuse épopée personnelle de
1940 à 1945 : Médaille militaire ; Croix de guerre française ;
Croix de guerre néerlandaise ; Médaille des évadés ; Médaille des
combattants volontaires de la Résistance.
Ayant
rejoint l’Angleterre et les SAS des forces françaises libres, il fut parmi les
premiers parachutistes français largués en Normandie avant même le débarquement
pour des opérations de sabotage des communications allemandes.
Jean-Jacques
avait accepté d’être deuxième après moi sur la liste du Front National que
j’avais constituée à Castres dans les années 1986. Seul élu, je démissionnai
pour lui laisser la place. Ses interventions étaient rares, toujours teintées
de son humour délicieux. Il était évidemment respecté, surtout par le maire et
ancien ministre Jacques Limouzy qui était mon adversaire politique mais aussi
un très bon ami car il ne manifesta jamais aucune venimeuse aversion contre le
Front National, accueillant avec moi dans sa mairie Jean-Marie Le Pen, et une
autre fois Marie-France Stirbois qu’il aidait volontiers de ses conseils
techniques lorsqu’elle était le seule députée du FN.
Limouzy,
dans cette ligne, voulut donc un jour honorer son prestigieux conseiller
municipal à qui il ne faisait qu’un reproche : celui d’être trop discret,
trop humble. Il fit préparer un beau coquetaile, exprima son admiration pour le
docteur et lui donna la parole. Jean-Jacques bougonna puis, comme se jetant à
l’eau sans trop savoir nager, il parla : moins d’une minute. Et pour dire
qu’étant donné ce qu’il voyait de l’état de la France, des trahisons et des
abandons qui en avait marqué l’évolution depuis 1945, il se demandait
quelquefois s’il n’aurait pas mieux fait de ne pas s’agiter pour rien
(sic !) pendant la guerre.
Bien
sûr, il ne regrettait rien, mais répugnant à toute expression de fierté,
c’était sa manière, sous l’élégance de l’auto-dérision, de ne surtout pas se
vanter de quoi que ce soit. Jacques Limouzy pestait avec raison de n’avoir pu
davantage le faire parler. Car il tenait à ce que les jeunes de sa ville sachent que la Résistance avait d’abord
été le fait d’hommes de droite et de héros comme Plat tandis que le parti
communiste approuvait l’alliance de Staline et d’Hitler et leur dépeçage de la
Pologne.
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À la même époque, grâce à Jean-Marie Le Pen, je fis la connaissance d’un homme
également fantastique, qui fut de notre groupe d’élus à Strasbourg, l’ancien
ambassadeur de France à Londres, le compagnon de la libération Michel de
Camaret.
Michel
est le héros central du célèbre film « Bataillon du ciel ». Lui aussi
avait été parachuté en Normandie, pour effectuer dans la zone du maquis de
Saint-Marcel (celui du jeune Le Pen) de délicates opérations nécessitant de
savoir manier correctement les cordons « bickford » et les explosifs.
Il ressemblait étonnamment à Plat, pas plus grand, aussi mince, aussi
flegmatique, mais naturellement, lorsque nécessaire, parlant davantage car,
après avoir été un brillant officier continuant la guerre de 1940 en Indochine,
il avait fait une brillante carrière de diplomate, à la suite de quoi il
rejoignait sans cesse tous les fronts des résistances anti-communistes ou
chrétiennes, de l’Indochine au Liban. Allant même, quoique sexagénaire,
crapahuter en Afghanistan avec les hommes du commandant Massoud, plus tard
assassiné par les islamistes.
Michel
de Camaret, jusqu’à sa mort, fut un grand fervent de Chrétienté-Solidarité.
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Mais je veux, aujourd’hui, absolument évoquer encore deux des personnages qui,
durant des années, se retrouvaient avec Jean-Jacques en un incomparable trio
d’Amitié Française, pour mettre sous enveloppe Présent, ce que notre petit
imprimeur ne faisait pas.
C’était
André Cohen qui, lui, ayant gagné la Tunisie pendant la guerre, avait
fait le débarquement en Italie avec l’armée du Maréchal Juin.
Fils
de rabbin, ardemment converti au catholicisme, André était exaspéré par le
« résistancialisme » des résistants de la treizième heure et aussi
par toute l’injustice faite selon lui au Maréchal Pétain sur lequel il avait à
peu près le même jugement plutôt positif que notre regretté ami le professeur
François-Georges Dreyfus ou la grande journaliste Annie Kriegel.
Le
troisième du trio était Noël Sage. Lui, catholique fervent, tout aussi
patriote que les deux premiers, tout aussi enclin sans hésiter à mettre sa peau
au bout de ses idées, avait été persuadé que le plus grand danger pour
l’Europe, plus encore que le nazisme, était le communisme. Il s’était donc
engagé dans la LVF et la division Charlemagne et s’était battu courageusement
sur le front de l’Est, où il avait constaté la triste réalité du nazisme qu’il
n’avait pas perçue dans son enthousiasme juvénile.
Noël,
fait prisonnier en 1944 par les soviétiques, fut de ceux qu’ils préférèrent
alors, plutôt que de les tuer, envoyer dans les camps de travail pour pallier
leur besoin urgent de main d’œuvre. Il paya durement le fait de n’avoir pas
choisi le bon camp, mais l’extraordinaire, c’est qu’il fut, après dix ans de
travaux forcés, de la poignée de survivants que, sous la IV° République, la
Croix-Rouge française put alors admirablement récupérer, ce qu’elle ne put
jamais faire sous la V° pour nos milliers de compatriotes d’Algérie
horriblement enlevés et détenus en Algérie.
Ainsi,
oui, je pense souvent à ces trois merveilleux amis, et qui s’aimaient tellement
parce que de même trempe d’homme, de même humilité, de même humour, même foi
patriotique et catholique : Jean-Jacques, le SAS de la France Libre, Noël
l’ancien SS de la Charlemagne et André, le fils du rabbin, de l’armée
d’Afrique, tous trois jusqu’au bout dans la même ferveur d’Amitié Française et
Chrétienne et qui ont œuvré avec moi pour notre mensuel Présent et la naissance
du quotidien auquel j’ai pour le moins apporté son titre…