Voilà maintenant dix ans (comme
le temps passe !) qu’après avoir très loyalement démissionné du bureau
politique du Front National (mais pas de son comité central et encore moins du
mouvement) j’en ai été exclu, déclaré « indésirable » (sic) pour des
motifs successifs et donc ineptes. On invoqua d’abord que je n’étais pas à jour
dans mon adhésion ! Très honnêtement, l’ex-mari de Marine Le Pen, Eric
Iorio, responsable des adhésions, rappela que je m’étais, comme chaque année,
acquitté de ma cotisation et qu’elle n’expirerait que plusieurs mois plus
tard !
Éjecté donc, sans que les
« éjecteurs » aient l’élégance de me convier au moindre entretien
pour me dire pourquoi, je n’en ai pas moins toujours conservé une attitude
d’a-priori de bienveillance, appelant d’ailleurs systématiquement, à ce jour, à
voter au premier tour pour Marine Le Pen aux présidentielles, et pour les
autres candidats aux autres élections comme lors des dernières municipales.
Malgré tout ce qui me distingue ou sépare du FN sur un certain nombre d’idées
et positions sur lesquelles il a évolué fâcheusement. Et pas moi.
Si je conserve au sein de ce
mouvement de nombreux amis, et non des moindres, qui comprennent parfaitement
cela, quelques nouveaux partisans acharnés (ce qui est bien) mais par trop
fanatiques et à l’esprit un peu étroit (ce qui l’est moins) osent m’imputer une
attitude de reniement ! Alors, « doucement les basses »,
messieurs ! Comme je l’ai développé dans
un texte sur les évolutions de la droite nationale, sur plusieurs positions
fondamentales, les reniements, parlons plus gentiment de changements, ne sont
pas de mon fait !
Le FN ne se situe plus à droite.
Soit ! Moi je demeure un animateur de « la droite de
conviction ».
Le FN ne veut plus, comme jadis,
remettre en cause la loi Veil. Moi je demeure un militant du respect de la vie
innocente.
Le FN a largement vacillé quant à
ses positions vis-à-vis de l’islam. Moi, non.
Le FN n’est plus le défenseur des
libertés scolaires, le défenseur de l’égalité des familles pour financer
l’école de leurs enfants, par le biais du « chèque scolaire ». Moi,
si !
Le FN a été bien ondoyant et pour
une fois, de fait, très « éclaté » sur l’abomination de la loi du
(pseudo) mariage pour tous. Moi, non !
Le FN fut jadis libéral en
économie lorsque Jean-Marie Le Pen, à l’époque de son admiration pour Reagan et
Thatcher, diffusait et montrait sur toutes les télévisions le petit livre
« droite et démocratie économique ». Je le trouvais pour ma part par
trop ultra-libéral. Aujourd’hui le FN est étatiste et antilibéral ! Moi,
j’étais et demeure un partisan des libertés économiques et de la défense et du
développement de la propriété et de la justice sociale selon les principes de
la Doctrine Sociale de l’Église. C’est le FN qui a varié. Moi, non !
Sur d’autres plans enfin,
patriote français mais aussi président de Chrétienté-Solidarité, je suis sur
l’essentiel en accord avec l’opposition du FN à la dictature eurocratique. J’ai
jadis, le premier, lancé avec Reconquête le slogan « Sortons de cette
Europe-là ! » et je dénonce les aberrations des politiques conjointes
à soubassement mondialiste de messieurs Obama et Barroso.
Pour autant, je ne suis pas sur
une ligne d’approbation inconditionnelle à l’égard de M. Poutine que j’ai
apprécié jusqu’à ce jour pour maintes raisons. Actuellement, je comprends en
effet l’inquiétude grandissante de ces pays qui furent sous le joug de l’Union
Soviétique : la Pologne, les pays baltes et les autres.
Si je n’ai que sympathie pour
l’identité russe et la belle religion orthodoxe qui l’imprègne, relevant du
patriarcat de Moscou, j’en ai autant pour les défenseurs de l’identité
ukrainienne. Je comprends donc aussi les ukrainiens fidèles du patriarcat de
Kiev. Mais surtout, ma solidarité bien ordonnée va d’abord vers les catholiques
uniates d’Ukraine dont la mémoire, avec celle des autres patriotes est celle
des millions de morts du génocide de « l’holodomor » perpétré par les
soviétiques.
Je comprends leur inquiétude
lorsque, dans les villes de l’Est, autour des statues de Lénine certains
brandissent encore les drapeaux rouges frappés de la faucille et du marteau.
Pour ma part j’éprouve exactement la même répulsion pour les nostalgiques de la
barbarie nazie que pour ceux de la barbarie soviétique.
En matière de politique étrangère
l’Institut du Pays Libre, quelquefois en convergence avec le FN, quelquefois en
divergence, s’efforce donc, en conformité avec ses valeurs de liberté et de
solidarité chrétienne, de réfléchir hors de tout emportement binaire en
fonction d’une réalité géopolitique et idéologique particulièrement mouvante
aujourd’hui.
Enfin, pour ceux qui nous
objectent qu’il serait aberrant de ne point nous aligner maintenant sur le
Front National alors qu’il va vers de grands succès électoraux, je réponds que
je demeure sur une ligne qu’énonçait jadis sans cesse Jean-Marie Le Pen :
« Mieux vaut être battu sur ses idées qu’élu sur les idées des
autres ». Je comprenais d’autant mieux cela que, très jeune, refusant la
trahison de la parole donnée, j’avais justement abandonné mon juvénile
gaullisme passager alors que De Gaulle remportait des scores électoraux
fabuleux.
Aujourd’hui, le Front National,
« parti gaulliste » selon M. Philippot, obtiendrait-il 80% des voix
et Marine Le Pen arriverait-elle à l’Élysée, si c’était, ce qu’à Dieu ne
plaise, pour faire une politique à l’encontre de nos convictions, je serais
évidemment, tristement mais assurément, un opposant.
Nous n’en viendrons pas là, je
l’espère.
Et justement peut-être parce que,
j’en ai la conviction, nos objections cheminent.
Quoi qu’il en soit, mes amis et
moi préférons être libres et pauvres dans la défense de nos idées que riches au
prix de leur abandon !