Il y a moins d’un quart de siècle, ce que l’on appelait la
droite nationale, par-delà sa diversité, se battait à peu près unie sur
quelques grandes lignes essentielles. Elle
était composée principalement du Front National dans l’ordre électoral mais
recouvrait tout un ensemble de familles politiques et civiques allant du Centre
National des Indépendants de Philippe Malaud à l’Action Française.
L’unité
se faisait sur les points suivants :
- L’anticommunisme : la dénonciation de la menace de l’URSS, avec son pacte de Varsovie sur l’Europe de l’Est, son empire du goulag et sa tutelle encore sur les pays d’Indochine et Cuba. Le refus tout autant du « modèle » chinois (et nord-coréen), avec son empire du laogaï. Nous dénoncions alors les plus de cent millions de victimes des crimes communistes contre l’humanité.- La défense du respect de la vie innocente. Jean-Marie Le Pen s’opposait très vigoureusement à la loi Veil. Il avait, avec sa femme et ses filles, participé à une grande marche pour la vie. Il en était de même pour la plupart de toutes les autres organisations et offices de droite nationale hormis pour « la nouvelle droite » (néo-païenne et racialiste).- L’opposition à l’immigrationnisme en tant qu’idéologie favorisant le déracinement et le déplacement de populations étrangères et surtout nombreuses, et de ce fait difficilement assimilables. Allant avec cela, la prise de conscience accrue du danger de l’expansion de l’islam en tant que phénomène idéologique porteur d’une théocratie totalitaire.- Le refus de l’idéologie du soi-disant antiracisme se découvrant de plus en plus comme un racisme à rebours, anti-français et anti-chrétien.- La méfiance grandissante à l’égard du projet de construction européenne s’avérant comme le constructivisme idéologique d’une technocratie mondialiste.
Sur
tout cela, il était certes nécessaire que la droite nationale adapte ses
analyses et ses positions en fonction des évolutions de la réalité du monde.
Mais il y a de plus ou moins bonnes ou mauvaises évolutions et de plus ou moins
bonnes adaptations. Cela appelle les constatations et précisions que
voici :
L’étiquette
de « droite nationale » recouvre aujourd’hui à l’évidence un ensemble
moins large. Ceci est dû notamment au fait que pendant longtemps le Front
National avec Jean-Marie Le Pen se définissait comme « la droite nationale
sociale et populaire ». Avec Marine, le Front National se proclame
désormais : « ni de droite ni de gauche ».
Pour
ce qui est de nous, nous n’avons pas varié, préférant néanmoins nous définir
plutôt comme étant d’une « droite de conviction » eu égard à nos
positions très claires et très fermes de maintien sur des valeurs politiques
morales et sociales fondamentales ou des positions correspondant toujours aux
nécessités de notre temps.
Venons-en
aux cinq points :
-
Sur l’anticommunisme, il va de soi que la réalité du communisme a beaucoup
évolué et qu’on ne peut l’aborder aujourd’hui que d’une manière différente de
celle du temps de l’empire soviétique. D’abord, l’idéologie marxiste, surtout
sous sa forme marxiste-léniniste du XX° siècle, ne séduit plus guère que des
dinosaures mélénchoniens ou des reptiles besancenistes.
Mais
cuisinés dans les sauces sino-maoïstes indochinoises ou stalino-coréennes, le
communisme demeure aujourd’hui puissant et menaçant, avec ses partis en tant
que système totalitaire de pouvoir d’encadrement et de coercition des peuples.
En
Russie, malgré son effondrement, le système de pouvoir et d’impulsion de la
société, constitué par le FSB (ex. KGB) d’où est issu Poutine, a subsisté
puissamment. Le maintien de la charogne siliconée du monstre criminel Lénine
dans son Mausolée de la Place Rouge (et ses statues dans bien d’autres villes)
ne peut vraiment être tout à fait considéré comme une anodine persistance. Aussi
ne faut-il pas négliger l’hypothèse qu’exprime l’écrivain et ancien diplomate
Vladimir Fedorovski, déclarant « la Russie de Poutine est autoritaire,
mais elle pourrait virer vers un état totalitaire ».
Les
politiques américaines et européennes sur l’Ukraine ont certes été lourdes de
fautes provocatrices grossières. Mais le fait est que désormais le peuple russe
et les minorités russes dans les pays de l’ex-URSS sont agités, la vodka aidant,
de graves pulsions de national-impérialisme soviétoïde.
Si,
chez certains en Occident, toute une déplorable « russophobie », au
sens exact du terme, existe bien, c’est-à-dire en tant que phénomène passionnel
et pulsionnel de haine instinctive, il ne faudrait pas y opposer une
russophilie tout aussi enthousiaste que celle qui nous conduisit avant 1914
à l’alliance qui nous jeta dans la
guerre.
Par
ailleurs, si l’on refuse avec raison les méfaits de l’idéologie mondialiste
occidentale, faudrait-il ne pas considérer le danger potentiel de notre
puissant et immense ensemble mondial bâti sur l’alliance de la Russie et de ses
satellites plus ou moins reconquis, de la Chine et aussi des pays de l’axe
islamiste chiite ?
-
Sur le respect de la vie et de la famille, l’évolution du FN a été
considérable. Elle a été marquée par des années d’affirmation récurrente, de
réunion en réunion de Marine Le Pen martelant qu’elle ne remettrait pas en
cause la loi Veil, mais tout de même qu’elle s’opposerait au remboursement de
l’avortement. Et puis cela aussi a sauté. Marine a déclaré très fermement
qu’elle ne défendrait plus cette position.
Sur
le soi-disant « mariage pour tous », l’évolution est, nous
semble-t-il, analogue. Dans un premier temps, certes, l’affirmation d’une
opposition à la loi Taubira : mais sans excès de la part de la direction.
Dans un second temps, voilà qu’on laisse déjà, selon la tactique du
« voleur chinois » si souvent évoquée par Jean-Marie Le Pen, des
« seconds couteaux » affirmer qu’on ne reviendrait pas sur cette loi.
-
Nous, sur ces questions de la vie et de la famille, nous ne changeons pas. Tout
simplement parce qu’il en va de refuser le meurtre des enfants à naître, qu’il
en va ,avec la défense du couple humain initiateur de la vie et protecteur de
l’enfance, de la préservation de la civilisation et de l’humanité face à la
néo-barbarie contemporaine. Pas besoin d’être chrétien pour s’opposer
cela !
-
Sur l’opposition à l’idéologie immigrationniste porteuse, avec la banalisation
de l’avortement, d’un processus de génocide par substitution de population,
nous ne changeons pas. Certes et heureusement, le FN demeure en cette question
plutôt sur sa ligne d’origine. Néanmoins il a beaucoup vacillé sur la prise en
considération du phénomène islamique qui constitue pourtant le point le plus
important de l’immigration.
Sans
doute influencé par sa fidèle amitié bien compréhensible pour nombre de
musulmans – et nous partageons cela – Jean-Marie Le Pen n’a jamais voulu
exprimer personnellement une ligne très claire de réfutation idéologique de
l’islam pourtant politiquement comparable au communisme dans sa dimension
totalitaire. Marine, toujours pragmatique et selon l’influence de ses
conseillers successifs, a quelque peu hésité dans son approche de la question.
Néanmoins, elle ne pouvait ignorer les sentiments dominants dans son électorat
et elle traite de l’islam sur une ligne de défense vigoureuse de la laïcité
sans pour autant jamais aller jusqu’à réfuter et explicitement refuser son
idéologie. Par prudence sans doute. Mais une prudence bien imprudente à moyen
terme.
-
Sur la question de l’antiracisme, l’AGRIF a influencé indéniablement, avec sa
cohérence d’analyse et ses actions, toute la droite nationale. Et notamment
dans le refus de tout racisme authentique, qu’il soit anti-français,
anti-chrétien, antisémite, et aujourd’hui anti-humain. Sur ce plan, on ne peut
guère constater d’opposition avec le Front National dans son ensemble.
- Sur la question de l‘Union Européenne, notre droite de
conviction défendant les valeurs de la civilisation chrétienne, n’accepte
évidemment pas le système totalitaire bruxellois broyeur des identités
nationales et aussi de la dignité de la personne humaine. Nous disons aussi
bien notre refus d’un repli nationaliste que d’une Europe conglomérat sans
frontières et sans âme.
Nous
croyons au réalisme d’une Europe des patries librement amies dans différents
pactes d’intérêts communs, économiques, géopolitiques, et bien sûr de sécurité.
Mais il n’est que temps de reconsidérer le rôle de l’euro qui devrait être
ramené à celui d’une monnaie de compte, monnaie commune mais non unique.
Nous
le savons, de très nombreux électeurs se reconnaissent dans les idées de la
droite de conviction. Même si trop peu de partis et d’hommes politiques se
réclament explicitement de ce positionnement.
Mais
ces idées s’expriment plus ou moins parmi eux. À chacun alors de voter pour qui
leur paraîtront les plus proches de ces valeurs de la vie, et de la dignité
humaine, de la famille, et des libertés.