vendredi 14 février 2014

Se souvenir du génocide des juifs, c’est bien. À condition que cela ne signifie pas le mémoricide des autres génocides !



En quelques trente-six heures, aller-retour, un de mes petits-fils, élève dans un collège de Castres, a été cette semaine amené avec sa classe visiter Auschwitz, voyage éducatif financé, organisé et guidé par la fondation du Mémorial de la Shoah.

Je ne conteste ni le principe ni l’utilité de pareils voyages. Je ne suis hélas pas sûr que l’accompagnement pédagogique en soit toujours exempt de lourdes occultations mémorielles.

Je pense qu’il serait bon de distribuer à tous les participants et accompagnateurs l’excellente et décisive préface de Me Gilles-William Goldnadel (président de France-Israël ; vice-président du CRIF) au maître-livre de notre ami Reynald Seycher « Vendée. Du génocide au mémoricide ». Goldnadel y brosse avec un grand talent de synthèse combien le génocide vendéen fut en quelque sorte la monstrueuse matrice , le modèle des entreprises exterminationnistes successives perpétrées dans notre époque moderne :
- Celui des Arméniens et autres chrétiens d’Orient par le régime des Jeunes-Turcs.
- Ceux des millions de personnes exterminées par les régimes communistes pour leur simple appartenance à une classe, paysanne ou bourgeoise.
- Et celui  bien sûr des Juifs massacrés de même pour la seule raison qu’ils étaient juifs.
J’ai parlé de cela à un très amical interlocuteur juif qui tenait à la spécificité monstrueuse, unique, de la shoah, prétextant que les juifs, eux, n’avaient été massacrés qu’en raison de leur appartenance, rendant ainsi leur génocide plus atroce que les autres. Et je lui ai redit :
- Comme si les vendéens n’avaient pas été massacrés tout simplement pour leur appartenance au peuple vendéen et chrétien !
- Comme si les Arméniens n’avaient pas été, eux aussi, dans des sophistications indicibles de cruauté, massacrés parce qu’arméniens (ou chaldéens, ou grecs, etc…)
- Comme si les « koulaks » n’avaient pas été exterminés uniquement parce qu’ils étaient des koulaks, c’est-à-dire d’une classe à anéantir !
- Et comme si, par dizaines de millions, dans des dizaines de pays, des chrétiens n’avaient pas été anéantis par les communistes pour la seule raison qu’ils étaient chrétiens !
Et les Cambodgiens, pourquoi furent-ils éliminés massivement sinon pour le seul crime, comme celui des Vendéens, d’être considérés comme une infra-humanité inapte à la « régénération » révolutionnaire ?

Mon interlocuteur a, je crois, convenu de cela.

Voilà pourquoi il faut espérer qu’un jour, refusant toute sélectivité dans l’indignation et tout racisme dans la mémoire, on amènera aussi des élèves se recueillir sur quelques lieux de torture et de mort des autres grandes abominations totalitaires : sur les immenses routes de viol, dégorgement et de torture de la déportation des Arméniens et des Chaldéens, d’Istanbul à Adana, Trébizonde et Alexandrette ; sur les gigantesques camps de la mort du goulag ou du laogaï. Il n’y a hélas, même tout près de chez nous comme à Katyn, que l’embarras du choix pour faire mémoire des abominations rouges ou vertes comme de celles du nazisme.

Et pour ce qui est des gigantesques tueries bolchéviques en Chine, en Indochine, en Corée du Nord, même si le nombre de films qui les évoque est sans commune mesure avec celui de la cinémathèque de la shoah, il est tout de même possible d’obtenir des documentaires ou de faire parler les historiens du Livre noir du communisme comme Stéphane Courtois ou Nicolas Werth.

Sinon, si l’on n’y prend pas garde, l’idée alors ne cheminerait-elle pas qu’il y a peut-être des génocides moins dignes de mémoire que d’autres, des victimes moins dignes de compassion, d’une moindre humanité peut-être ?


Chers amis juifs, ne laissez donc pas trop seul Me Goldnadel dans sa belle réflexion de vérité historique et de fraternité humaine !