Le jeûne du Ramadan est chose
redoutable pour nos concitoyens musulmans. En effet, à chaque jour suffit son
jeûne ! Aussi, chaque soir, le repas de rupture de ce jeûne est-il
l’occasion de faire bombance. C’est que le jeûne, ça se fête, et on festoie
quelquefois longtemps dans la nuit, non pas avec ses bruits et ses odeurs
désagréables, comme le formula un jour lourdement ce malheureux Jacques Chirac
incapable de toute perception poétique des choses, mais avec ses musiques, ses
effluves épicées, ses parfums.
On rompt le jeûne d’abord en
mangeant puis en appliquant le doux précepte du Coran : « vos femmes
sont un champ pour vous ; allez à votre champ comme vous voulez »
(cor 2-223).
Précisons à ce stade que les politiques
et les religieux, évêques et prêtres, qui se bousculent dans les mosquées pour
les diverses ruptures du jeûne, ne sont pas du tout conviés à partager
« le champ de labour ». Les musulmans ne sont pas comme les esquimaux
d’autrefois ou ces peuplades sympathiques qui, encore aujourd’hui, considèrent
qu’offrir sa femme au visiteur de passage est un devoir de l’hospitalité. Mais,
n’est-ce pas, à chacun sa culture…
Pour les fidèles du Prophète, auxquels le Pape François a souhaité un très bon Ramadan, le gueuleton quotidien est non
seulement source d’un embonpoint prospère que ne dissimulent pas toujours les
djellabas mais peut occasionner aussi de graves diabètes tant les cornes de
gazelles et autres rahat-lokoums sont sucrés, sans parler des raisins secs dans
le couscous.
Pour ma part, n’étant pas adepte
des formes de ce curieux jeûne islamique hyper calorique, je continue à
pratiquer trois repas quotidiens de rupture de mes trois jeûnes : le
premier avec le café pour seule boisson ; le déjeuner, avec généralement,
en été, un rosé du Ventoux (celui des moines du Barroux) ou un clairet de
Bordeaux ; le dernier, enfin, avec toujours une bouteille de ces « vins francs » comme aimait les désigner Léon Daudet.
Je les choisis chaque soir au gré
de mes humeurs, de mes lectures du jour et de la météo, et bien sûr des avis
d’Élisabeth, parmi tous ces petits vins pas trop chers que je ramène
inlassablement de mes voyages, apportant ainsi un peu partout, de l’Aquitaine à
l’Alsace et du Roussillon au pays du Gros Plant, ma petite contribution à la
résistance vigneronne sur laquelle est bâtie ce qui subsiste de civilisation.