mardi 9 avril 2013

Au train où l’on va, pourquoi pas un référendum pour ou contre le mensonge !


Voici que tous ceux qui clament d’ordinaire qu’ils ne veulent pas d’un « ordre moral » glapissent maintenant de concert pour que l’on décide enfin d’une « moralisation de la vie publique ». Les plus fanatiques moralistes ne peuvent que se réjouir.

Mais si j’analyse bien l’affaire Cahuzac, ce n’est pas tant le fait d’avoir planqué son fric dans des banques hors des frontières sacrées de la patrie qu’on lui reproche. Bien plus, et à juste titre, au-delà encore de ses dénégations dans le style « la vérité si je mens !», ce qui indigne c’est le cynisme d’une abyssale contradiction entre la pratique privée et l’acte public. Pour résumer, on était avec ce ministre non seulement dans le registre des gendarmes-voleurs, des douaniers receleurs, mais plus encore dans le genre dénonciateur , car appelant à combattre les délinquants fiscaux avec les emphases de cette vertueuse indignation qui est une des constantes de la gauche depuis les assemblées hurleuses de la Révolution française.
Scrogneugneu, c’était pas avec lui, Cahuzac, de la loge des frères de la vertu à l’Orient de Villeneuve sur Lot, qu’on laisserait en paix ces salopards d’évadés fiscaux !

Cela dit, dans une époque de relativisme généralisé, où il est de bon ton d’affirmer que « la vérité, ça n’existe pas » voilà qu’en manifestant  l’évidence du mensonge on manifeste bel et bien celle de la vérité. Car qu’est ce que le mensonge sinon le contraire de la vérité ?

Alors, pour moraliser, nos intègres gouvernants imaginent toutes sortes de mesures telles que les déclarations dûment formulées sur l’honneur, mais aussi toujours plus d’enquêteurs pour les vérifier. Ce qui au moins créerait des emplois.

On parle même d’un référendum où l’on demanderait aux Français s’ils souhaiteraient plus de mesures moralisatrices. Mais cela nous semble demi-mesure. Car, ma foi, pourquoi ne pas poser simplement la question aux français : « Voulez-vous de la suppression du mensonge ? ». Si le oui l’emportait, et on peut l’espérer, le mensonge étant alors interdit, quel progrès serait ainsi réalisé ! Jean-Jacques Rousseau en ressusciterait de contentement. Hors des appétits égoïstes des anciennes sociétés,  l’État nouveau, l’État enfin vraiment socialiste n’administrerait plus qu’une grande et belle collectivité d’individus francs et loyaux. Plus qu’avec Savonarole, plus qu’avec Calvin, réalisant enfin les sublimes aspirations des grands ancêtres de la Révolution, les Saint-Just et les Robespierre, la vertu finalement tiendrait lieu de constitution.

Les seuls en désarroi seraient sans doute les juges et les avocats, ayant bien moins d’affaires à traiter avec cette interdiction du mensonge. Supposons un oui à 99,9% à la question, quel triomphe ce serait pour la moralisation de la vie publique.
Or le résultat pourrait être de cet ordre. En effet, je suis persuadé que tous les dignitaires religieux appelleront à voter oui au « non au mensonge ». En tête le grand rabbin et, derrière lui, comme d’ordinaire, nos cardinaux et évêques et aussi tous les dignitaires de l’islam, et encore tous les grands maîtres des obédiences maçonnes rangées moralement derrière le plus illustre vénérable, celui de l’illustre loge de la parfaite sincérité de Pinsaguel sur Garonne.

À notre François, ce franciscain laïque, la République morale pourrait bien alors faire l’hommage d’une statue immortalisant la déchéance du mensonge.
Ah, si un grand  sculpteur, un moderne Praxitèle, pouvait alors le croquer dans une de ces grandioses postures qui nous le font tant admirer, dressé comme un coq gaulois, les traits tendus par une vigilante héroïcité, le regard scrutateur et sévère vers l’avenir radieux dont il assure la réalisation à Valérie Trierweiller.
On lirait sur le socle : « À François l’inoubliable vainqueur du mensonge, l’hommage unanime de la République vertueuse ».

Arrêtons-nous là mais, en vérité, comment traiter autrement que par le sarcasme ces indignes appels des dindons politiciens pour la moralisation de la République.
Quel déferlement d’hypocrisie !

Car s’il n’est en effet pas bien de mentir et de dissimuler, surtout lorsque l’on se présente comme un rigoureux et impitoyable justicier, il est tout de même moralement bien pire de tuer. Or, voici que le permis de tuer, de tenailler les enfants dans le sein de leur mère, est encore plus encouragé par l’État, l’avortement désormais partout assuré, conseillé, remboursé.
Oh certes le frère Cahuzac agissait bien misérablement en traquant les auteurs de ce qu’il pratiquait lui-même.
Mais quelle que soit l’abjection de cette duplicité de maquereau dirigeant de police de la vertu, elle est inférieure à celle de l’acceptation objectivement bien plus criminelle de l’avortement. Mais pour cela Cahuzac ne devra pas rendre des comptes ici bas, ni lui ni presque tous les autres politiciens presque tous complices dans l’acceptation du meurtre banalisé de l’enfant à naître.

Alors nous, nous pensons qu’il y a quelque indécence dans les hurlements des hyènes contre ce bouc émissaire de Cahuzac. Car tous ensemble, avec lui, leur État républicain est celui du meurtre des bébés.