L’excellent ami Jean-Marc Molitor, très
imaginatif et talentueux patron de Minute, avait bien fait de me persuader de
ne surtout pas omettre de regarder, ce dernier mardi 29 janvier 2013, le
téléfilm « Crime d’État » et le débat qui s’en est suivi.
Cela m’a ramené au siècle dernier où ma
vie de président du Centre Charlier (et donc du pèlerinage de Chrétienté) et de
Chrétienté-Solidarité mais aussi de président de l’AGRIF et, bien évidemment,
de député du Front National au Parlement Européen, a été fortement marquée par
l’action de Charles Pasqua, largement évoqué dans « Crime d’État »
sans que j’aie pour ma part aucune conviction sur son rôle dans l’affaire Boulin. J’ai en revanche la claire mémoire,
et les dossiers de presse, sur le rôle pernicieux que joua cet homme qui, par
sa faconde et son image d’homme d’ordre (en effet !) fascinait toute une
partie du brave peuple de droite.
Il déclarait certes, et cela plaisait,
partager les valeurs du Front National (le FN de l’époque) mais simultanément
il prenait comme conseiller et cheville ouvrière en « antiracisme »
le dénommé Patrick Gaubert, petit « Big Brother » expert en police de
la pensée correcte et violemment hostile à l’AGRIF.
Pasqua fascinait une partie du monde
catholique traditionnel, on le louait avec une incroyable naïveté dans
Permanences, par ailleurs bonne revue de l’excellente association Icthus.
Un cadre important du pèlerinage de
Chrétienté en était un ardent partisan souhaitant (et oeuvrant efficacement à
cette fin) pour que le pèlerinage ne soit plus dépendant du Centre Charlier,
organe fondateur et organisateur pendant onze ans, puisque je présidais cette
institution.
Je veillais pourtant scrupuleusement,
par conviction fermement antitotalitaire, par refus de l’esprit de parti, à ce
que pas plus le Front National que tout autre ne s’avisât de récupération
électoraliste. Mais toute une ramification versaillaise de l’organisation du
pèlerinage préférait en réalité une discrète coloration de droite pasqualienne,
boutiniste ou villiériste.
C’était pourtant ce Pasqua, ministre de
l’Intérieur, qui avait organisé ou laissait organiser l’incroyable embuscade de
la Guadeloupe par les indépendantistes chauffés à blanc et chouffés au rhum,
contre notre groupe de députés des droites européennes avec Le Pen et nos
invités et journalistes.
Notre avion, interdit d’atterrissage à
la Martinique où devait se dérouler notre session d’étude, se posa alors à
l’aéroport du Lamentin à la Guadeloupe, où les autres passagers ayant débarqué
et notre groupe restant à bord, je sortis de l’appareil car Le Pen se méfiait
et m’avait demandé d’aller voir. Je pus alors constater le piège mis en place
dans un contexte qui eut pu tourner au massacre. Je raconterai à nouveau les
détails de cette affaire alors excellemment traitée dans Présent, d’autant plus
que Jean Madiran était à bord de cet avion pour un incroyable aller-retour
sans, qu’à part moi, nul autre député, journaliste et fonctionnaire ait pu poser
pied à terre.
Mais quelle stupéfiante naïveté aussi
sur Pasqua que celle de Philippe de Villiers allié à lui pour les élections
européennes de 1999 et qui m’affirma, plus tard, la main sur le cœur, après
leur querelle, n’avoir pas connu le passé ni perçu vraiment les aspects
troubles du personnage, pourtant l’un des fondateurs principaux du SAC, le
principale officine barbouzarde et tortionnaire de la répression anti-OAS.
J’écris donc en ce moment, non pas pour annoncer des mémoires, genre historico-littéraire auquel je ne me risquerai
pas et toujours entaché de subjectivité et d’auto-censure.
En revanche, sur le mode d’Annie
Kriegel dans son excellent « Ce que j’ai cru comprendre », je vais
exprimer, pour que les leçons de certaines expériences ne soient pas perdues,
ce que j’ai pour ma part pu comprendre des événements politiques que j’ai
traversés, m’efforçant toujours, à mon modeste niveau, de défendre notre idéal
dans les turbulences politiques, les manigances, les coups tordus et les passions
humaines.
Si quelque embûche des hasards de la
vie, toujours possible, ne l’interdit pas, je développerai ce que je viens
d’évoquer pour le numéro de Reconquête
du mois de Mars.