jeudi 12 octobre 2006

Du génocide arménien et de la législation en matière de Mémoire

Nul plus que moi dans les années où je siégeais au Parlement Européen n’a milité pour la reconnaissance du génocide arménien qui a atteint des sommets de cruauté et d’horreur et, pour preuve, je reproduis ici l’intégralité de l’article du « Dictionnaire de la Réplique » qui lui est consacré en réfutation de Bernard Lewis

« Ce génocide est fort douteux » déclare Bernard Lewis dans Le Monde du 16 novembre 1993.
C’est en effet le propos négationniste que va développer cet orientaliste anglo-américain qui relativise systématiquement les génocides perpétrés pat les Turcs en particulier et par d’autres peuples de l’islam.

Bernard Lewis écrit : « Nul doute que des choses terribles ont eu lieu, que de nombreux Arméniens – et aussi des Turcs – ont péri. Mais on ne connaîtra sans doute jamais les circonstances précises et les bilans des victimes. Songez à la difficulté que l’on a de rétablir les faits et les responsabilités à propos de la guerre du Liban, qui s’est pourtant déroulée il y a peu de temps et sous les yeux du monde ! Pendant leur déportation vers la Syrie, des centaines de milliers d’Arméniens sont morts de faim, de froid… Mais si l’on parle de génocide, cela implique qu’il y ait eu politique délibérée, une décision d’anéantir systématiquement la nation arménienne. Cela est fort douteux. Des documents turcs prouvent une volonté de déportation, pas d’extermination ».

Devant ces propos similaires à ceux des négationnistes les plus extrémistes des exterminations nazies ou communistes, l’AGRIF, présidée par l’auteur de ces lignes, réagit immédiatement, relayée par les organisations attachées à la défense de la mémoire arménienne.

Lors du procès, le président de la 17ème chambre correctionnelle, Jean-Yves Monfort s’interrogeait sur les « arrières pensées » ayant pu pousser Lewis à la négation (Libération du 17-10-1194).

Ce génocide, dont le nombre des victimes s’établit à plus de 1,5 millions de personnes, fut en effet longtemps nié par ceux qui désiraient que ce terme ne puisse être utilisé que pour définir celui du peuple juif. Ainsi, pour cette raison, au Parlement Européen à Strasbourg, Simone Veil s’était emportée vivement contre l’idée de sa reconnaissance.

Même si l’on peut regretter que puisse exister un délit d’opinion, on pesait en l’occurrence combien il était invraisemblable qu’il ne puisse se rapporter qu’à une seule tragédie historique : celle de l’extermination des juifs pendant la seconde guerre mondiale.

Cela se vérifia lorsque l’avocat du journal Le Monde Me Baudelot déclara que « la loi Gayssot est une loi atroce qui crée le délit d’opinion en France » mais ajoutant aussitôt : « Elle est limitée et les massacres arméniens ne rentrent pas dans le champ d’application de la loi » (selon le compte-rendu dans Libération du 17/10/1994).

Selon Le Monde, Lewis fut traité « d’agent turc » par l’avocat d’origine arménienne et futur ministre Patrick Devedjian.

Rappelons ici que c’est dès 1916 que le pasteur allemand Johannes Lepsius, fondateur de la Deutsche-Orient Mission, avait publié le Rapport secret sur les massacres d’Arménie, portant à la connaissance de ses compatriotes l’ampleur des liquidations physiques commises à l’encontre du peuple arménien sur les ordres du gouvernement Jeune-Turc. Le livre fut saisi par le gouvernement allemand pour ne déplaire à la Turquie.

Après la guerre, le pasteur compléta son rapport (réédité à la librairie Payot en 1987) tandis que bien d’autres témoignages rendaient compte de l’ampleur d’un génocide caractérisé par des actes d’une cruauté systématique sans limite.

Le grand organisateur des massacres fut le ministre Talaat dont le Daily Telegraph du 29 mai 1922 publia le télégramme daté du 15 mai 1922 à destination de Naïm Bey, à Alep, secrétaire principal de l’administration des déportés :
« Le gouvernement a décidé d’exterminer entièrement les Arméniens habitant en Turquie. Ceux qui s’opposent à cet ordre ne pourront plus faire partie de l’administration. Sans égard pour les femmes, les enfants et les infirmes, quelque tragiques que puissent être les moyens d’extermination, sans écouter les sentiments de la conscience, il faut mettre fin à leur existence ».

Et à la même époque un décret du même Talaat déclare :
« Le droit des Arméniens de vivre et de travailler sur le territoire de la Turquie est totalement aboli. Le gouvernement, assumant toutes ses responsabilités à ce sujet, a ordonné de ne pas même laisser les enfants au berceau ».

Plus personne d’informé ne nie aujourd’hui le génocide arménien pas plus que l’on ne peut raisonnablement nier les génocides perpétrés par le communisme. Mais les Arméniens doivent savoir que grâce à l’AGRIF leur juste combat pour la mémoire de leur génocide avança d’un grand pas.

Article extrait du « Dictionnaire de la Réplique » (Ed. Godefroy de Bouillon, en vente au Centre Charlier, 70 Bd Saint-Germain, 75005 Paris, 37 €- 40€ franco de port)

J’avais donc on le comprend pour faire avancer la cause utilisé la logique de la loi Rocard-Gayssot… et ses contradictions. Mais il va de soi comme je l’ai développé sur Radio-Courtoisie, hier, qu’il est stupide de demander des condamnations pénales allant jusqu’à la prison contre ceux qui le nient car aucune vérité historique ne saurait être imposée par une loi de répression. C’est là une inadmissible régression totalitaire.

Pour appuyer cela je tiens à exprimer combien je trouve de même odieux, abjects ceux qui nient le génocide des Harkis et les atroces massacres de nos compatriotes pieds-noirs perpétrés par les fellaghas algériens en 1962 avec l’assentiment de fait du général De Gaulle interdisant à notre armée de bouger.

Pour autant à quoi bon réprimer ceux qui le nient ?

Je suis pour que l’on réfute les différents négationnistes pas pour qu’on les persécute ! Une vérité historique comme la foi ne peut pas être imposée par la violence. On mesure ici une fois encore combien la magnifique conférence de Benoît XVI à Ratisbonne correspondait à une nécessité.