lundi 28 mars 2022

Mémoire du massacre de la rue d’Isly à Alger le 26 mars 1962

 

Ce dernier samedi, 26 mars 2022, voilà exactement soixante ans que des soldats de l’armée française ont massacré des Français : environ 80 morts et plus de 150 blessés.

Cela se passa à Alger dans la rue d’Isly, longeant le quartier de Bal-el-Oued où le petit peuple des pieds-noirs ne se résolvait pas à accepter le choix que leur laissait la politique en faveur de l’indépendance algérienne du gouvernement du général de Gaulle : « la valise ou le cercueil ».

Aussi, quoique sans illusions, soutenaient-ils avec l’énergie du désespoir la résistance qui entendait se battre jusqu’au bout pour tenter d’infléchir le cours des choses.

L’armée française assiégeait Bab-el-Oued, imposait un féroce blocus et alla jusqu’à faire bombarder le quartier par l’aviation française.

Les responsables de la résistance de Bab-el-Oued à la répression gouvernementale avaient décidé pour ce 26 mars d’appeler la population à une manifestation solennellement annoncée comme totalement pacifique, totalement désarmée.

Aux environs de 14h45, trois jeunes filles de la famille Ferrandis, Renée, Monique, Annie, descendant de leur immeuble, rejoignirent la manifestation colorée de drapeaux tricolores qu’un barrage du 4ème régiment de tirailleurs algériens de l’armée française venait de couper.

Nicole, la plus petite des quatre sœurs était restée dans le petit appartement familial. Toute sa vie, elle témoignera du drame qui s’abattit ce jour-là sur leur famille.

A Renée qui demandait aux tirailleurs de les laisser passer la réponse fut celle d’une balle de 12,7 lui éclatant la tête. Cependant que Monique était très grièvement blessée. Nous avons maintes fois reçu Nicole Ferrandis dans notre émission de Radio-Courtoisie quand elle tombait un 26 mars ou un jour proche.

Le soir même de cette tuerie commandée par des soldats français dans le cadre des ordres venus de haut, le général de Gaulle qui parlait le soir même à la télévision française ne l’évoqua même pas.

On ne s’en étonnera pas si l’on se souvient de sa répartie, en mai 68, à un Pompidou stupéfait qui s’insurgeait contre sa recommandation de ne point hésiter à faire tirer dans les jambes des étudiants en émeute : « Mais Pompidou, figurez-vous que j’ai passé ma vie à tirer contre des Français ! » (In « Algérie le piège gaulliste » d’Henri Christian Giraud p.669).

Mais pour ce qui était de l’agonie de l’Algérie française, le pire allait venir :

-un peu partout des enlèvements, des assassinats atroces de pieds-noirs et de Français musulmans fidèles à la France.

-les exterminations génocidaires des harkis partout perpétrées avec les sévices les plus atroces.

-Et aussi la journée du 5 juillet 1962 à Oran où l’ordre comminatoire venu de l’Elysée est que l’armée française soit impérativement consignée dans ses casernes.

Et ce jour là, l’enlèvement par des foules islamistes déchaînées de près de trois mille hommes, femmes et jeunes filles, dans les hurlements de terreur que l’ignoble général Katz qui aurait pu les sauver peut entendre de son quartier général.

-des hommes que l’on va lyncher, torturer, pendre aux crocs des abattoirs de la ville.

-des femmes, par centaines entraînées vers les plus atroces destinées par la soldatesque fellagha.

Crime contre l’humanité, sans précédent dans notre histoire, de non-assistance délibérée à une multitude de compatriotes chrétiens, juifs ou musulmans en danger de mort ou déjà livrés aux pires atrocités.

Cela, sans l’excuse que le crime d’indifférence, d’abandon, de complicité de fait soit imposé par un ennemi vainqueur. L’armée française était alors militairement totalement victorieuse d’un FLN partout défait.

Rien n’imposait d’en finir ainsi, dans la plus déshonorante  des turpitudes avec l’histoire de la France en Algérie. Rien n’imposait cela au général de Gaulle sinon un fascinant mépris machiavélien pour la vie humaine.