jeudi 2 janvier 2020

Pour Don Carlos


Grand lecteur dans ma jeunesse de Pierre Benoît, et donc de son roman « Pour Don Carlos », j’ai toujours eu beaucoup de sympathie pour l’idéal carliste en Espagne qui anima, notamment pendant la guerre civile ces admirables chouans de Navarre (mais pas seulement), qu’étaient les « requetés ». Avec leur belle devise : « Dios, Patria, Fueros, Rey », leur hymne : « l’oriamendi », et surtout leur courage au combat dans une belle émulation héroïque avec les admirables phalangistes de José Antonio, les requetés font partie, comme les Cristeros mexicains, et comme nos Vendéens et Chouans et autres combattants de la foi et de la liberté, Polonais, Baltes, Russes, Ukrainiens, Vietnamiens, Arméniens, Libanais du grand mémorial spirituel multicontinental de la chrétienté qu’il faudrait sans doute dans l’avenir inscrire dans la pierre d’une immense crypte prolongeant celle du Valle de los Caidos.

Chapeau Carlos !

Mais pour l’heure, c’est pour l’exploit d’un autre Carlos (prénom fréquent au Liban) que les prétendants carlistes, que je ne saurais taire une jubilatoire admiration : Carlos Ghosn !

Ô je sais bien, je l’ai déjà écrit, que tout dans ce grand chef d’entreprise, sur le plan des valeurs sociales, ne nous est pas sympathique. Et inversement, nous pouvons voir une grande admiration pour la civilisation japonaise, pour les grandes vertus de courage, de civisme, de discipline, de solidarité et de belle culture de ce peuple. Avec cependant, au revers de la médaille, une certaine tradition de dureté si ce n’est de cruauté telle qu’elle se manifesta atrocement dans les persécutions au XVIe siècle contre les convertis au catholicisme et, plus près de nous, pendant la Seconde Guerre, en Indochine occupée où des milliers de nos compatriotes furent massacrés par la « Kempeitaï », l’impitoyable organisation de police, de répression et de terreur de l’armée du soleil levant.

Mais le moins qu’on puisse lui reconnaître, c’est que Carlos Ghosn, non sans quelques pratiques de réorganisations contestables et de méchants licenciements, a su globalement redonner de la prospérité à Renault et de surcroit sauver Nissan, chose difficile à avaler pour de très fiers dirigeants japonais.

On lit ce jour dans Le Figaro un entretien avec un autre grand industriel français (et fier Vendéen non négationniste du génocide de 1793), Didier Pineau-Valencienne. Il répond à propos de Ghosn : « Il est tombé au Japon dans un traquenard probablement ourdi par des concurrents malveillants ». Ce dont d’ailleurs tout le monde se doutait un peu.

Toujours est-il que Carlos Ghosn a réussi à s’extraire ou plutôt à se faire exfiltrer de sa résidence japonaisement si surveillée où on lui interdisait la moindre conversation téléphonique avec son épouse. Au nez et à la barbe d’une police qui n’est pas faite de plaisantins ! Chapeau l’artiste, et chapeau à ceux qui ont réussi l’opération !

On attend maintenant de savoir par combien de « seifukus » (vulgairement hara-kiri) dans la hiérarchie policière et gouvernementale, elle se soldera. Et bien sûr, nous suivrons attentivement la conférence de presse que donnera Carlos Ghosn la semaine prochaine. Avec d’ailleurs une certitude, c’est qu’il ne dira rien de ceux qui ont monté son exfiltration et dont on peut espérer qu’ils ne se feront pas prendre. Car, sans doute, ont-ils déjà pu, eux aussi, ne pas s’attarder au pays des douces geishas et des durs samouraïs.

En attendant ce qu’il dira, il me plait de savoir que Carlos est libre dans le pays de son enfance. Libre dans ce Liban qui a tant besoin d’un homme de son génie pour refaire décoller son économie ruinée et reculer la pauvreté galopante.

Et si finalement l’exfiltration de Carlos Ghosn était un bienfait de la providence pour le pays des cèdres où, selon la Bible, coulaient à profusion « le lait et le miel », symboles de prospérité et de mansuétude divine.

Quant à la France, notre pauvre France, sa magistrature ira-t-elle jusqu’à se déshonorer une nouvelle fois en poursuivant misérablement Carlos Ghosn pour avoir jadis organisé une belle soirée familiale et entrepreneuriale dans la splendeur du château de Versailles ? Sorte d’hommage d’un roi de l’industrie moderne à l’œuvre du Grand Roi…