Les médias français ont claironné toute la journée de lundi que le Hezbollah
avait remporté largement les élections législatives de dimanche au Liban. La
réalité est que peu de choses ont changé sur le front politique libanais et que
la presse occidentale accorde trop d'importance au Hezbollah. Compte tenu du
totalitarisme que fait régner ce parti sur la communauté chiite, il est normal
qu'il ait consolidé son pouvoir en son sein.
Le système politique libanais fondé sur le communautarisme ne permet en réalité à personne d'obtenir une majorité (le Hezbollah n'a que 12 députés, 27 avec ses alliés du mouvement chiite Amal sur 128).
Il y a en effet 128 sièges de député au
Parlement (chiffre paire !), 64 chrétiens et 64 musulmans dont 28 sunnites, 28
chiites, 7 druzes et 1 alaouite. Les partis politiques représentent chacun une
communauté précise et au final tout le monde doit composer avec tout le monde.
Il est donc techniquement impossible au Hezbollah ou à un autre de remporter
les élections.
Dès la fermeture des bureaux de vote dimanche, le sunnite Saad Hariri, le chef du Hezbollah Hasan Nasrallah ainsi que tous les chefs de file chrétiens ont exprimé le désir de travailler ensemble pour former un nouveau gouvernement.
Cela étant dit, le "Parti de Dieu", n'a pas besoin de remporter des victoires électorales, étant une puissante organisation armée, la seule au Liban en dehors de l'armée nationale, il impose continuellement ses volontés par la menace et l'intimidation.
En fait, les vrais vainqueurs de ces élections sont les Forces Libanaises de Samir Geagea (ancienne organisation armée chrétienne transformée en partie politique), ils ont en effet fait passer leur bloc parlementaire de huit à seize sièges. Le quasi-monopole du parti du général Aoun sur les communautés chrétiennes a donc été brisé.
D'autre part, le nouveau chef du CPL (parti du général Aoun), Gebran Bassil, a une position différente sur le Hezbollah que le président Michel Aoun et la pression chrétienne sur le parti chiite va augmenter avec le renforcement des Forces Libanaises.
Les observateurs politiques locaux n'excluent pas une alliance entre les Forces Libanaises, le CPL d'Aoun et les partisans sunnites de S. Hariri pour affronter le Hezbollah.
Richard Haddad