mercredi 8 février 2017

SYRIE – RUSSIE – CHINE – TURQUIE – ARABIE « DROITS DE L’HOMME », « DROIT DE L’HOMMISME », « RESPECT DE LA PERSONNE HUMAINE » ET… DÉCALOGUE



On peut résumer en ces quatre références les pôles du débat idéologico-politique et moral sur la question des « droits de l’homme ».

On sait combien cette notion fondée et surgie des Lumières a pu être justement critiquée par les penseurs de l’école contre-révolutionnaire et par la droite de conviction. « Qu’est-ce que l’homme ? », écrivait Joseph de Maistre, énonçant ensuite qu’il ne connaissait que des types humains identifiés par leur appartenance nationale et autre.

Alors, en effet, comment pouvait-on raisonnablement évoquer les mêmes droits universels pour des hommes bien différents. Il y a là une grande part de vérité. Il n’en demeure pas moins que « l’homme », ce n’est pas seulement un concept mais une commune réalité d’appartenance de tous les êtres relevant en ce bas-monde, par-delà les différences existentielles de « l’essence humaine » conçue par le Créateur, ce que l’on appelle communément « nature humaine ».


Et plus encore que tous les autres êtres vivants dans la diversité de leur espèce, l’homme, créé à l’image de Dieu, créé avec le miracle de sa conscience, de sa connaissance qu’il va mourir, est par essence fondamentalement digne de respect.

Par la révélation du Décalogue, Dieu lui a dicté la charte universelle de ses devoirs. D’où découlent à l’évidence les corollaires de ses droits. Ainsi le devoir de respecter la propriété d’autrui fonde le droit de n’être pas volé.

À moins de tomber dans le nominalisme et de nier toute notion d’espèce, l’appellation « l’homme » énonce donc une réalité et donc exprime une vérité. Ce qui précède fonde qu’en tant que tel, l’homme, qu’il soit progressivement sorti de l’animalité ou qu’il ait reçu la révélation de sa dignité de créature de Dieu, est par-delà ses conditions de vie, un universel sujet de droits.

Mais de cela, le « droit de l’hommisme » est certes une perversion idéologique. Perversion par ce que Jean Madiran désignait comme « les droits de l’homme sans Dieu », c’est-à-dire des droits hors du socle immuable du Décalogue ; des droits se proclamant universels selon les diverses déclarations universelles depuis 1789 mais évoluant selon une constante variabilité voire dans une véritable inversion des valeurs en fonction des conditionnements totalitaires ou néo-totalitaires de l’opinion.

Ainsi, l’avortement a –t-il été érigé comme une « valeur » de notre société européenne, un « droit de la femme » inclus désormais dans les « droits de l’homme ».


Cette perversion-subversion ne saurait remettre en cause une claire doctrine des droits de l’homme explicitée dans le respect de la dignité de la personne humaine, de la vie innocente et de toutes les valeurs du Décalogue.

La vérité c’est que les droits de l’homme sont piétinés dans nos sociétés modernes par la négation du premier de ces droits qui est le droit de naître pour l’être humain conçu, fondement plus général du droit de vivre.

La vérité c’est que tout en pesant bien les impératifs d’une politique réaliste pour le bien commun national puis international, on ne saurait accepter que ne soient pas suffisamment prises en considération les plus massives violations des droits de l’homme, hier et aujourd’hui, par des régimes perpétrant des massacres, des exterminations voire des génocides.

Ce fut hier le cas de tous les États communistes autant que du nazisme. Ce l’est toujours aujourd’hui des régimes communistes subsistant dont l’emprise porte encore sur le tiers de l’humanité : Chine, Corée du Nord, Vietnam, Laos, Cuba.


Ce l’est toujours à différents degrés de tous les pays d’islam, dont aucun (1) ne respecte le droit à la liberté religieuse, dont la première exigence est celle de la liberté de conversion pas à sens unique.

Bien sûr il y a l’enfer des pires monstruosités de l’État Islamique, d’al-Qaïda et de toute la ramification de l’islam jihâdiste et terroriste. Cela ne saurait occulter le fait que le régime baassiste syrien dans la continuité des Assad père et fils, a duré depuis 1971 dans le plus total mépris des droits de l’homme par les massacres, les assassinats, les exécutions de masse, et non sans double jeu avec les islamistes sunnites ou avec le Hezbollah. Comment oublier en particulier les assassinats de nos diplomates et le massacre de nos paras du Drakkar ?

Mieux vaut certes aujourd’hui, comme l’a développé notre ami le général Cann, le maintien du régime que la prise du pouvoir à Damas par l’État Islamique. Et il est bien évident qu’il est nécessaire de parler avec Bachar el-Assad. Mais de là à l’encenser comme le font certains militants de droite ou de « ni droite ni gauche » voire de généreux mais quelque peu naïfs religieux et militants chrétiens, il y a une marge. Et ne parlons pas aujourd’hui de ceux qui « émargent » à la générosité syrienne…

On comprend bien sûr que les chrétiens de Syrie préfèrent la victoire de Bachar à celle de l’État Islamique. Et nous aussi. Mais encore une fois, cela ne peut cependant faire oublier d’une part que le régime syrien, l’Arabie saoudite et la Turquie portent une accablante responsabilité dans l’émergence de cet État. Cela ne peut faire oublier que les chrétiens de Syrie dont l’alliance avec le régime est réciproquement vitale ne sont tout de même jamais totalement sortis du régime de dhimmitude.

Enfin, nous n’avons pas attendu qu’Amnesty International publie ses informations sur les crimes de masse perpétrés dans la prison de Saïdnaya au nord de Damas, pour savoir l’abomination des geôles syriennes qui, au Liban occupé aussi, comme celle que nous avons jadis visitée à Tripoli, n’étaient que des centres de tortures et des abattoirs humains.


Tout comme le fut le tristement célèbre immeuble de la Loubianka à Moscou. Là le nombre des victimes de la Tcheka puis du Guepeou fut d’un ordre bien supérieur. Le FSB y a ensuite succédé au KGB. Mais Poutine n’a toujours pas jugé bon de faire de ce lieu un mémorial des crimes du communisme. Pire encore, le buste de Djerjinski, l’organisateur de l’empire bolchevique du crime de masse, modèle pour les nazis, est toujours en bonne place dans la grande salle de réunion. On s’en souvient, Poutine y est même allé il y a quelques années pour exalter le bon vieux temps de la puissance du KGB avant l’effondrement de l’URSS. On verra bien s’il persiste dans l’attitude qui fut celle de Clémenceau consistant à tout accepter en bloc de l’héritage de la révolution.


Nous, nous préférons la position de Charles Maurras : « la tradition est critique ». Et ce n’est pas parce que l’invocation des droits de l’homme a, avec « Le contrat social », servi de pièce maîtresse à l’idéologie révolutionnaire que nous devrions être approbateurs des régimes qui les bafouent abjectement immensément, non sans quelquefois le cynisme de prétendre les respecter.


Mais bien sûr, redisons-le, il n’est pas de droits de l’homme qui tiennent dans le refus du Décalogue.



(1) Le Liban n’est pas « un pays d’islam », mais un pays multiconfessionnel à pouvoirs partagés.