mardi 10 janvier 2017

Maurras : la preuve par Poutine.

« Politique d’abord ! »
Dieu que cette maxime aura été injustement reprochée à Charles Maurras ! Ce qui imposait et impose à tout honnête connaisseur des idées politiques, maurassien ou non, royaliste ou non, de rappeler que, par sa formule, Maurras n’entendait évidemment pas mettre la politique au dessus de tout.
Lui-même d’ailleurs n’avait-il pas, très jeune, commencé d’abord à œuvrer dans le domaine culturel en tant que militant et poète du Félibrige, le grand mouvement de renaissance linguistique et littéraire fondé avec quelques autres par le grand poète provençal Frédéric Mistral ?
Mais très vite, à la fin du XIXème, il en était arrivé à la conclusion que, sans restauration d’un ordre politique protecteur, la renaissance culturelle était à plus ou moins long terme inéluctablement vouée à l’échec et à la mort. Et ce, pas seulement pour la Provence et le provençal, mais pour toute la culture française et toute culture en général comme l’avaient par exemple conclu les patriotes irlandais, grecs ou polonais en reconquête de souveraineté pour préserver leur identité.

Maurras, après avoir rejoint le jeune mouvement d’Action Française qu’il devait faire très vite évoluer en un mouvement pour la restauration de la monarchie, n’abandonna jamais sa conviction fondamentale que l’ordre de la politique n’était pas au dessus de celui de la culture mais qu’il en déterminait l’épanouissement en préservant plus ou moins la nation et la société des invasions ou des subversions barbares.
Et quoi que l’on puisse penser par ailleurs de la politique et des positions de Maurras, comme il n’était pas idéologiquement du tout partisan d’un régime totalitaire, lui, l’agnostique si admirateur de Jeanne d’Arc ne contestait nullement aux catholiques leur légitime conviction sur la « primauté du spirituel », exprimée dans la devise de Jeanne d’Arc : « Dieu, premier servi ».

L’observation du rôle aujourd’hui de la Russie dans le monde est un fascinant exemple de l’importance du « politique d’abord ».
Les résultats de la politique de Poutine, sur laquelle, n’étant pas russes, on doit évidemment porter un regard, fut-il admiratif, distancié et critique, sont en effet tels qu’ils font admirablement oublier, et c’est en cela leur réussite, une grande partie de la réalité de la Russie.
Certes, l’immensité de son territoire continue toujours, comme aux XIXème et XXème siècles, d’être l’élément majeur porteur de l’idée de sa puissance.
Or, en bien des domaines encore, et non des moindres, la Russie demeure un pays faible.
-         Faible d’abord démographiquement. Avec environ 50 fois la superficie de l’Allemagne (25 fois celle de la France), sa population (147 millions) n’est même pas celle de ces deux pays(80+70).
-         Faible économiquement avec une économie n’atteignant pas le douzième de celle de la Chine, de l’Europe ou des États-Unis.

Mais néanmoins, avec ses atouts de la production russe d’hydrocarbures remarquablement utilisés diplomatiquement vis à vis des pays de l’OPEP, et avec celles d’une puissance militaire bien inférieure à celle des États-Unis, mais vigoureusement actionnée en Syrie et comme force d’intimidation des Pays Baltes à l’Ukraine, Poutine a fait politiquement de la Russie l’État qui aura le plus pesé ces derniers temps sur les grands enjeux du monde.

Avec sa maitrise de grand joueur d’échecs mais aussi de dames, il a partout diplomatiquement damé le pion à Obama et aux dirigeants européens. Il n’a pas fait une politique prioritairement au service de l’économie mais il a utilisé les ressources énergétiques russes comme facteurs de puissance politique.

Cette observation et l’admiration que l’on peut avoir pour son art de gouverner ne signifient bien sûr pas du tout que l’on doive béatement considérer que tout ce à quoi s’emploie Poutine soit nécessairement toujours bon pour la France et pour tous les peuples européens.
Nous verrons probablement, assez vite aussi, ce que sera le gouvernement de Donald Trump : sera-t-il essentiellement dicté par des motivations économiques ou par la puissance politique ? Servira-t-il une bonne « politique d’abord », non seulement pour les États-Unis mais pour la réanimation de l’occident face au communisme qui n’est pas assez mort et face au totalitarisme islamique qui est trop vivant ?

Plus que jamais, chez nous, devraient être conciliées la devise de Jeanne d’Arc et la maxime chère à Maurras : « Dieu premier servi » et « politique d’abord ».

Pour cela, il nous faudrait un chef de l’État digne de ce nom.