lundi 2 février 2015

Alain Juppé : sur l’islam, des propos révélateurs d’une pensée bien courte.

Interrogé par un grand hebdomadaire de fin de semaine, Alain Juppé s’exprime sur l’islam.
Il déclare : « Il ne faut pas céder à la tentation de l’amalgame entre un islam de France respectueux des valeurs républicaines et un fanatisme islamiste d’un autre âge. Je vois bien que cette tentation est forte chez certains ».
Plus loin, il déplore : « Le conseil français du culte musulman, qui est une bonne initiative de Nicolas Sarkozy, ne marche pas bien ». Il poursuit : « Il faut le réformer pour qu’il joue mieux son rôle, par exemple dans la formation des imams ».


Comme son mentor et modèle de jadis, notamment en pratique démagogique, Jacques Chirac, Juppé, certes pas nul en tous les domaines, a le don de formuler des lieux communs, souvent avec la suffisance qui le caractérise.


Sur la question de l’islam, la superficialité de ses jugements a toujours été consternante. On se souvient de la manière enthousiaste dont il rapporta sa rencontre au Caire, place Tahrir, lors du prétendu « printemps arabe », avec des responsables des Frères musulmans.
S’imaginant sans doute a priori qu’ils étaient des sauvages, il déclara combien il avait été surpris de les trouver courtois et tolérants! Comme si un fanatisme idéologique de fond excluait, surtout chez des dirigeants, une politesse de forme !


Ses propos du jour sont dans la même ligne de déni de réalité. Bien sûr, tout le monde s’accorde, et nous aussi, sur l’erreur et l’injustice que l’on commettrait en « amalgamant » tous les musulmans, c’est à dire en les faisant tous partisans ou complices du jihâdisme et du terrorisme.


Mais pour autant, comment ne pas voir que dans ce qu’il appelle « l’islam de France » les Frères musulmans et autres organisations islamistes internationales sont de fait les plus organisés et de plus en plus nombreux ? Chez nous elles n’invitent certes pas au jihâd ni au terrorisme comme elles le font par exemple en Egypte.
Leur travail consiste simplement à éduquer, structurer, encadrer l’oumma en France. Car il n’y a pas d’oumma de France !


L’oumma, « la communauté des croyants », est la valeur fondamentale de l’islam, supérieure à toutes les autres. Elle n’est pas seulement le principe d’unité de croyance, d’appartenance religieuse. C’est la réalité matricielle, globalisante, totalitaire. Le musulman n’existe que par elle et à travers elle, sans les distinctions apportées par le christianisme entre le spirituel et le temporel et surtout la valeur et l’autonomie de la personne humaine.


Il y a bien sûr en France, comme ailleurs dans le monde musulman, quelques intellectuels désireux de sortir l’islam de son carcan liberticide de toute libre analyse. Mais ce ne sont pas forcément ceux qui, habiles dans l’art de la taqiya , se plient volontiers au discours des « valeurs de la République ». Quelles valeurs d’ailleurs exactement ? Tellement elles ont été évolutives au delà des abstractions !
Pour ceux-là, sans précipitations et sans fanatisme, sous le couvert de ces valeurs de la République, l’important n’est-il pas d’implanter toujours plus le « Dar el islam » ?
Les valeurs de la République ? Mais oui : celles d’une république islamique !


Enfin, Juppé ne pèse pas du tout l’immense erreur commise hier par son rival d’aujourd’hui, Nicolas Sarkozy, avec la création du Conseil Français du Culte Musulman.
Le cardinal Lustiger, sur cela, manifesta alors avec raison son opposition à « faire ainsi de l’islam une religion d’État » en la dotant de surcroît d’un clergé qui n’avait jamais existé dans la tradition sunnite.
Quand on a un minimum de connaissance de la réalité de l’islam et de ses organisations, on pèse combien est illusoire et même absurde le désir de Juppé que ce conseil puisse « mieux jouer son rôle dans la formation des imams ». car s’il y a, redisons-le, une commune conscience d’appartenance à l’oumma, les rivalités des écoles juridiques d’interprétation de la charia, des confréries, des solidarités tribales et des stratégies d’implantation des organisations financées par différents États sont âpres.


Il est prévisible que l’élaboration de cette formation sera l’occasion de nouvelles querelles au sein du conseil que préside le recteur Boubakeur qui ne tient le peu d’influence qu’il a que par l’appui des gouvernements.