mercredi 12 novembre 2014

« Mort aux cons ! ». Vaste programme…

C’est un usage fréquent dans les conversations politiques du café du commerce que de citer ce hâdith du colonel de Gaulle qui, passant dans la cour de la caserne et entendant ainsi hurler l’adjudant de semaine à propos de malheureux nigauds, aurait répondu par ce commentaire aussi amusé que désabusé.
Vaste programme en effet. Mais le souhait de voir périr les cons est sans doute aussi vieux que l’homme qui, comme nous le rappelait le grand Alexandre Vialatte, remonte à la plus haute antiquité. Et nul doute que, bien avant le fondateur de la V° république, beaucoup aient pu ironiser sur ce vœu d’une illusoire hécatombe des cons qui ne meurent pas plus vite que les autres.

Il faut pourtant constater que le facteur de la connerie humaine n’est pas suffisamment pris en compte dans les œuvres historiques et politiques.
Les auteurs, semble-t-il, dans une sorte de constante de bienséance académique, répugnent à analyser et mettre en avant ce facteur essentiel des cheminements de l’histoire. Comme si tout ne s’expliquait que par les idéologies, les logiques stratégiques, les ambitions personnelles, les passions amoureuses ou les haines.

Alors que la connerie joue un rôle immense. Il est vrai qu’elle est un concept subtil, à la définition difficile et extensive. Elle ne se confond ni avec l’ignorance, ni avec la bêtise.

Elle peut certes être le fait de pauvres idiots mais tout autant de brillants diplômés.
La vérité même c’est que son extension va de pair avec « l’instruction » comme on disait autrefois. L’irremplaçable Molière a fort bien exprimé que le sot savant est plus nuisible que le sot ignorant.
Mais la connerie, ce n’est pas non plus tout à fait la sottise. Chaque con y apporte en fait ses propres ingrédients, très souvent ceux de la vanité, du désir de paraître ou du contentement admiratif de soi-même, la joie d’en « boucher un coin » à ses interlocuteurs.

Lorsque je regarde à la télévision ce grand dadais si diplômé de Jean-Pierre Jouyet, dont on comprend qu’il soit si proche des deux François (Hollande et Fillon), je ne peux m’empêcher d’ observer et de penser qu’il respire surtout la connerie, la satisfaction de lui-même et bien sûr le plaisir de « faire la roue » devant les journalistes qui l’y encouragent, ces journalistes auxquels la plupart des politiciens veulent complaire puisque les médias constituent désormais le premier pouvoir dans nos républiques.
Ce grand escogriffe de Jouyet, avec les journalistes du Monde, a donc voulu « faire l’intéressant » comme disait ma grand-mère. Et de leur montrer que, lui, il était capable de manœuvrer entre Hollande et Fillon, à sa manière plus « fût-fût » que ses deux patrons successifs.
Qu’à l’Elysée, on croit encore pouvoir jouer sur les rivalités des concurrents à l’élection à la présidentielle, il faudrait être idiot pour en douter. Et c’est dans cette mission que le dindon Jouyet s’est affalé !Pris dans un de ses accès de vantardise, il a glissé sans retenue sur la pente de sa mégalomaniaque connerie. Il y laissera sans doute très vite son poste pour une autre sinécure de moindre importance.
Mais sa connerie ne le tuera pas. Les cons ne se font jamais Hara-Kiri !
  

Le Front National et de Gaulle.

Pour revenir à l’exclamation du général, au Front National on peut pour le moment se réjouir de ce que dans le marigot politicien, non sans raison désigné comme l’UMPS, non seulement il y a abondance de cons mais leur disparition ne semble pas très programmée.
Mais ce n’est sans doute pas que pour le « vaste programme » l’on s’y réfère de plus en plus au modèle du général.

Au sujet de ce dernier, il y en a pour tous les goûts. Ou presque. Les médias ont donné de l’audience à la présence à Colombey les Deux Églises du vice-président Philippot, l’oracle du parti pour commémorer l’anniversaire de sa mort avec une centaine de bons jeunes gens. Étrange mort d’ailleurs dont seuls les rares intimes purent voir la dépouille.

Selon la ficelle dialectique du médiatiquement correct on a bien sûr opposé positivement ces jeunes gaullistes philippotiens à « la vieille garde des nostalgiques de l’Algérie Française ». Comme si l’on ne pouvait pas aussi légitimement parler des nostalgiques du gaullisme !

Toujours est-il que Philippot se campe fièrement  dans une grandiloquence gaulliste à la Malraux.
Marine, elle, n’est qu’apparemment un peu gênée. Pour sa part, histoire de ne pas courroucer l’électorat Algérie française de papa et de son compagnon perpignanais, Louis Alliot, elle s’affirme « gaullienne », distinguo subtil recouvrant un tri critique dans la référence gaulliste avec le refus d’admirer la politique algérienne.
Enfin, pour les plus réticents au modèle de l’illustre général, Bruno Gollnisch a émis quelques fortes réserves.

Ainsi en matière de référence à l’illustre général y en a-t-il au Front National à peu près pour tous les goûts.
Mais c’est évidemment le propos de Marine Le Pen qui fixe la ligne essentielle, celle d’une référence, d’une continuité par rapport à la politique d’indépendance nationale censée avoir été menée et réussie par le général de Gaulle.

Je ne réagirai aujourd’hui que sur ce point. Je laisse de coté pour l’heure tout ce que je pense de positif du de Gaulle de 1940 selon l’image de « l’épée et du bouclier » chère au colonel Rémy, plus négativement du de Gaulle de 1945 et de l’abomination de 1962.

Car s’il est incontestable qu’il ne fallait pas abandonner l’Algérie dans des conditions de repli aussi déshonorantes, il va de soi que son indépendance ou son autonomie aurait pu être déterminées de telle sorte que ne soient ni sacrifiées les populations dans d’immenses crimes contre l’humanité, ni sacrifié ce qui assurait à la France, notamment et d’abord par rapport aux États Unis, son indépendance stratégique et énergétique.
Ce que, même Eric Zemmour, pourtant très admirateur de de Gaulle a enfin reconnu, écrivant dans « Le suicide français » : « De Gaulle choisit donc le progrès économique et social contre la grandeur impériale et la profondeur géostratégique ».

La vérité c’est que de Gaulle ne fut nullement visionnaire dans sa volonté hargneuse et cynique  d’abandon précipité de l’Algérie que rien n’imposait et dont il n’aimait pas les populations et même, sans doute, les détestait-il profondément.
La vérité c’est qu’il a alors rapetissé la France, amputée de son espace géopolitique saharien et de ses capacités de contrôles migratoires.
Voilà pourquoi la référence nostalgique et même idolâtrique d’un Philippot et de ses partisans à de Gaulle, et la concession sans doute essentiellement électoraliste que leur fait Marine Le Pen ne sont pas à mettre à l’actif de l’actuelle réflexion politique du Front National.