vendredi 6 juillet 2012


Bernard Antony, président de l’AGRIF, président du Cercle d’Amitié Française juive et chrétienne, communique :

Génocide arménien : Laurent Fabius et le Conseil Constitutionnel pèsent-ils bien ce qu’ils font ?

En vérité en refusant de considérer également les génocides de grande ampleur et avérés de l’histoire moderne, et notamment celui des Arméniens et autres chrétiens de Turquie, alors que seul est reconnu celui des Juifs, et réprimée sa négation, Laurent Fabius et le Conseil Constitutionnel commettent une ignominieuse injustice raciste à l’égard de nos compatriotes d’origine arménienne ou des diverses communautés chrétiennes anéanties par les Jeunes Turcs.

Ils fournissent aux adeptes du négationnisme du génocide des Juifs, seul réprimé par la loi, l’imparable argument que leur opinion est interdite parce qu’elle offense un tabou dogmatique à préserver inquisitorialement.

Il n’est pas en effet besoin d’être féru de droit et de psychologie sociale pour savoir que cette reconnaissance exclusive du génocide des Juifs et la sanction exclusivement encore de sa négation induit l’effet pervers d’une suspicion de plus en plus généralisée. Pourquoi donc n’y a-t-il désormais, en 2012, qu’une croyance imposée, qu’un seul dogme dont la contestation est sévèrement punie ? Peut-on croire que cette réflexion ne court pas un peu partout ? La plupart des juifs qui ne sont pas idiots pèsent combien cela est absurde et objectivement propagateur du négationnisme.

La talentueuse écrivain et journaliste juive Annie Kriegel avait dès le 3 avril 1990 dans le Figaro dénoncé prophétiquement la stupidité de la loi stalinienne Rocard-Gayssot visant à « légitimer une insupportable police juive de la pensée ».

 Ainsi, de plus en plus nombreux sont ceux qui trouvent curieux qu’il faille imposer par la force de la loi la croyance en ce seul génocide, la punition de sa seule négation.

Faut-il que certains responsables juifs et hommes politiques comme Laurent Fabius soient si aveugles ou si bêtes pour ne pas voir cela ? Voudraient-ils propager le négationnisme qu’ils ne s’y prendraient pas autrement.

À l’évidence, ne pas reconnaître également tous les génocides, avérés et indubitables, certes d’étendues inégales mais si proches par les horreurs exterminationnistes relève d’un odieux racisme. Les actes de barbarie, de cruauté, de raffinement dans les tortures les plus indicibles ont caractérisé l’extermination d’un million et demi d’Arméniens, Chaldéens et autres chrétiens de Turquie. On y retrouve, avec plus d’ampleur quantitative, l’atrocité du génocide des Vendéens.

Mais hélas, les génocides des Arméniens et des Juifs ne sont pas les seuls au XX° siècle. Comment occulter celui des Ukrainiens exterminés par millions et d’autres peuples encore de l’URSS ; et plus tard celui du peuple cambodgien ?

Conscient d’exprimer ici une opinion très majoritaire parmi les juristes et les historiens, chrétiens, juifs ou agnostiques, j’exprime en deux points ce qu’il faudrait décider pour en finir avec l’incohérence mémorielle et l’instrumentalisation politique de l’histoire :

-         Abolition par le Parlement de la loi de police la pensée « Rocard-Gayssot ». Le rappel en préambule de ce vote du principe de respect de la liberté de pensée,  de recherche et de débat en matière historique, limité par les seules lois de répression de l’injure et de la diffamation.

-   Reconnaissance solennelle par le Parlement, après proposition des Académies compétentes de L’Institut de France, selon une procédure à établir, des génocides dont la nation française et l’humanité doivent garder la mémoire et notamment :
Les génocides des Vendéens, des Arméniens, des Juifs, des Ukrainiens, des Cambodgiens… sans préjuger des autres exterminations pouvant être ultérieurement encore qualifiées de génocides.

Pour l’heure, ayant œuvré avec l’AGRIF, comme le sait le Conseil Central de leurs organisations, pour la reconnaissance du génocide qui a atrocement exterminé plus des deux tiers de leur peuple, j’exprime à nos compatriotes d’origine arménienne, sans oublier les rescapés en France des autres communautés chrétiennes de Turquie, notamment assyro-chaldéennes, grecques et autres,  le souhait que continue le combat pour la mémoire de leurs nations martyres.