Bernard Antony, président de l’AGRIF, président
du Cercle d’Amitié Française juive et chrétienne, communique :
Génocide
arménien : Laurent Fabius et le Conseil Constitutionnel pèsent-ils bien ce
qu’ils font ?
En vérité en refusant de considérer également les génocides
de grande ampleur et avérés de l’histoire moderne, et notamment celui des
Arméniens et autres chrétiens de Turquie, alors que seul est reconnu celui des
Juifs, et réprimée sa négation, Laurent Fabius et le Conseil Constitutionnel
commettent une ignominieuse injustice raciste à l’égard de nos compatriotes d’origine
arménienne ou des diverses communautés chrétiennes anéanties par les Jeunes
Turcs.
Ils fournissent aux adeptes du négationnisme du génocide des
Juifs, seul réprimé par la loi, l’imparable argument que leur opinion est
interdite parce qu’elle offense un tabou dogmatique à préserver
inquisitorialement.
Il n’est pas en effet besoin d’être féru de droit et de
psychologie sociale pour savoir que cette reconnaissance exclusive du génocide
des Juifs et la sanction exclusivement encore de sa négation induit l’effet
pervers d’une suspicion de plus en plus généralisée. Pourquoi donc n’y a-t-il
désormais, en 2012, qu’une croyance imposée, qu’un seul dogme dont la
contestation est sévèrement punie ? Peut-on croire que cette réflexion ne
court pas un peu partout ? La plupart des juifs qui ne sont pas idiots
pèsent combien cela est absurde et objectivement propagateur du négationnisme.
La talentueuse écrivain et journaliste juive Annie Kriegel
avait dès le 3 avril 1990 dans le Figaro dénoncé prophétiquement la stupidité
de la loi stalinienne Rocard-Gayssot visant à « légitimer une insupportable police juive de la pensée ».
Ainsi, de plus en plus
nombreux sont ceux qui trouvent curieux qu’il faille imposer par la force de la
loi la croyance en ce seul génocide, la punition de sa seule négation.
Faut-il que certains responsables juifs et hommes politiques comme
Laurent Fabius soient si aveugles ou si bêtes pour ne pas voir cela ?
Voudraient-ils propager le négationnisme qu’ils ne s’y prendraient pas
autrement.
À l’évidence, ne pas reconnaître également tous les
génocides, avérés et indubitables, certes d’étendues inégales mais si proches
par les horreurs exterminationnistes relève d’un odieux racisme. Les actes de
barbarie, de cruauté, de raffinement dans les tortures les plus indicibles ont
caractérisé l’extermination d’un million et demi d’Arméniens, Chaldéens et
autres chrétiens de Turquie. On y retrouve, avec plus d’ampleur quantitative, l’atrocité
du génocide des Vendéens.
Mais hélas, les génocides des Arméniens et des Juifs ne sont
pas les seuls au XX° siècle. Comment occulter celui des Ukrainiens exterminés par
millions et d’autres peuples encore de l’URSS ; et plus tard celui du
peuple cambodgien ?
Conscient d’exprimer ici une
opinion très majoritaire parmi les juristes et les historiens, chrétiens, juifs
ou agnostiques, j’exprime en deux points ce qu’il faudrait décider pour en
finir avec l’incohérence mémorielle et l’instrumentalisation politique de l’histoire :
- Abolition par le Parlement de la loi de police
la pensée « Rocard-Gayssot ». Le rappel en préambule de ce vote du
principe de respect de la liberté de pensée, de recherche et de débat en matière historique,
limité par les seules lois de répression de l’injure et de la diffamation.
- Reconnaissance solennelle par le Parlement, après
proposition des Académies compétentes de L’Institut de France, selon une
procédure à établir, des génocides dont la nation française et l’humanité
doivent garder la mémoire et notamment :
Les génocides des Vendéens, des Arméniens, des
Juifs, des Ukrainiens, des Cambodgiens… sans préjuger des autres exterminations
pouvant être ultérieurement encore qualifiées de génocides.
Pour l’heure, ayant œuvré avec l’AGRIF,
comme le sait le Conseil Central de leurs organisations, pour la reconnaissance
du génocide qui a atrocement exterminé plus des deux tiers de leur peuple, j’exprime
à nos compatriotes d’origine arménienne, sans oublier les rescapés en France des
autres communautés chrétiennes de Turquie, notamment assyro-chaldéennes, grecques et autres, le souhait que continue le
combat pour la mémoire de leurs nations martyres.