Adieu à François-Georges Dreyfus.
Il était un grand universitaire, un grand patriote, et un chrétien luthérien, plus fervent défenseur de la papauté que la plupart de nos évêques.
Dans la ligne de Robert Aron, il ne portait pas sur les années 1939-45 un regard manichéen.
Je me souviens de ses propos sur le sujet lors d’une conférence qu’il était venu prononcer chez moi. Il nous disait : « Si le 9 novembre 1942, date de l’occupation de la zone encore libre, le Maréchal Pétain avait choisi de quitter la France pour Alger et prendre la tête de la résistance, c’eût été mieux pour la France mais bien pire pour les Français, et, pour moi, petit enfant de race juive, cela eût probablement signifié la déportation et la mort. »
La France eût alors en effet connu le sort d’un pays directement dirigé par un gauleiter nazi, sans l’écran, si imparfait soit-il, du gouvernement de Vichy.
François-Georges était resté deux jours à la maison, heureux de retrouver un peu la région où il avait, avec d’autres enfants juifs, bénéficié de la discrète et efficace protection de préfets de Vichy, dans l’Hérault et dans le Tarn.
Ce luthérien de baptême souhaitait la grande retrouvaille chrétienne dans la « maison mère » de l’Eglise catholique romaine. En fait, je crois pouvoir dire sans le trahir qu’il n’était pas loin de l’itinéraire du pasteur Viot, qu’il connaissait bien, vers le catholicisme.
La dernière fois que je l’avais rencontré, c’était à Radio-Courtoisie (il était un grand ami d’Henry de Lesquen). À peine marchait-il encore, comme plié sur lui-même, sa colonne vertébrale toute recourbée. Mais il luttait jusqu’au bout par l’écrit et la parole pour l’honneur de l’intelligence française et du christianisme.
Aujourd’hui, nul doute qu’il ne soit dans la lumière à laquelle il aspirait.