mardi 12 mai 2009

Le pape devrait aussi aller se recueillir en Arménie, en Russie et au Cambodge

Communiqué de Bernard Antony
Auteur de Histoire des Juifs d’Abraham à nos jours qui me vaut la grande animosité de quelques antisémites obsessionnels, j’ai écouté avec émotion les propos de Benoît XVI à Yad Vashem. Cependant, on se doit de mettre sur le compte de la propre émotion du pape en ce lieu une involontaire mais grave omission : en effet, son vœu que pareilles abominations ne puissent se renouveler n’a pas été assorti du rappel que depuis la chute du nazisme en 1945, elles n’avaient cessé de se perpétuer dans l’univers concentrationnaire et exterminateur du communisme, avec notamment l’himalaya d’horreur du génocide cambodgien.
Dans son célèbre livre sur le goulag traduit en Suisse (URSS, sa 16ème république) en 1980, le juif russe Avraham Sifrin, rescapé du goulag et devenu israélien, avait établi non seulement la carte (non exhaustive) des camps de travail, prisons « psychiatriques » et autres lieux d’affliction mais celle des 41 camps de la mort en Union Soviétique. Là on exterminait notamment en raison de l’appartenance à une classe ou à une religion. Avec courage, le journaliste israélien Sever Plocker a demandé le 21 décembre 2006 que l’on se repente dans son peuple du fait que de trop nombreux juifs aient été parmi "les plus grands meurtriers des temps modernes" dans leur participation à l’exterminationisme communiste aux différents visages non moins répugnants depuis Lénine et Trotski jusqu’à Pol-Pot que celui de l’antisémitisme.
Ce serait donc ternir gravement la mémoire de la Shoah que de la faire servir, involontairement certes, à l’occultation des grands crimes contre l’humanité perpétrés avant et après.
Avant, il y eut au XXe siècle, le génocide des Arméniens et autres chrétiens perpétré par le régime des Jeunes-Turcs. Avant et après, de 1917 à nos jours ce fut de la Baltique à la mer de Chine, l’œuvre de mort du communisme avec ses cent millions de victimes.
Aucun Yad Vashem ne saurait hélas en tenir la liste et les neiges de Russie ou les jungles d’Extrême-Orient recouvrent l’anonymat des victimes par dizaines de millions.
L’Eglise catholique ne doit pas aujourd’hui se laisser accuser de sélectivité voire de racisme dans la mémoire. Dans un voyage ultérieur le pape devrait donc se rendre en Arménie puisqu’il n’a pas voulu ou pu, en Turquie, évoquer le génocide. Il devrait se rendre dans quelques lieux symboliques de l’exterminationnisme communiste. Ce pourrait être Katyn ou le canal de la mer Blanche pour l’Europe, Pnom-Penh pour l’Asie. Ainsi la mémoire des enfants juifs massacrés accueillera-t-elle aussi celle des enfants d’Arménie, de Pologne, de Russie, de Chine et d’Indochine, rejetant ainsi le racisme de fait d’un négationnisme par occultation mémoricide.

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