Ça n’arrête pas ! Ma boîte de courriels est saturée par les invitations d’amis qui se font les représentants commerciaux, à titre gracieux, de sites internet surchargés de publicités et censés aider les gens à communiquer, se retrouver, discuter, se montrer…
L’un m’invite à mettre ma trombine sur tel site, l’autre insiste pour que ma face paraisse sur tel autre qualifié de « réseau social en ligne », un autre encore m’incite à rejoindre, comme lui, un « carnet d’adresses pour ne jamais perdre vos contacts, 6 millions d’inscrits » rien de moins ! On comprend pourquoi les renseignements généraux ne recrutent plus ! Un clic sur sa souris évite au brave inspecteur une journée de filature, d’écoute ou de mise à jour de ses fiches cartonnées… les activistes en ligne lui ont mâché le travail. De même qu’au militant d’extrême gauche préparant le grand soir…
Il y a surtout dans ces démarches une attirance pour le voyeurisme qui m’étonne venant de gens habituellement critiques sur une société où notre espace de liberté et de tranquillité se réduit à peau de chagrin. Mode, snobisme, manque d’originalité ? En tous cas, Big Brother étend son recrutement, donnant ainsi naissance à la race des tradis-voyeurs et des natios-exhibitionnistes.
Fort heureusement, mon réseau social n’est pas virtuel et je garde le contact avec toutes les amies et tous les amis chers à mon cœur. Et si j’ai perdu de vue quelques uns d’entre eux, je ne désespère pas de les retrouver au gré des hasards de la vie, à la terrasse d’un bistrot ou dans un hall de gare, à l’enterrement d’une connaissance commune ou au mariage d’une copine, lors d’un séjour en Bretagne ou d’un passage en Suisse, à Lille ou à Hanoï… que sais-je, la Providence n’est pas avare en bonnes surprises qui auront toujours plus de charme qu’une recherche frénétique sur le oueb !
Comme disait Perret (Jacques, évidemment), il est grand temps de « remettre le pétrole dans ses nappes, la vapeur dans le pot-au-feu, l’électricité dans les nuages et les nuages dans le ciel… » … et internet à sa place de simple outil de travail !
Yann Baly