lundi 27 novembre 2006

Avec l’assassinat de Pierre GEMAYEL, notre Liban encore frappé

Je dis « notre Liban » d’abord parce que depuis vingt ans que nous fréquentons ce pays, nous sommes un certain nombre à Chrétienté-Solidarité à le considérer ainsi.

Ce sentiment s’inscrit dans une continuité séculaire de l’amitié française pour son identité chrétienne.

Dés le 11ème siècle, il accueille en effet en libérateurs les croisés venus soutenir les chrétiens d’Orient encore majoritaires dans les terres où le christianisme à commencé à se répandre. L’Islam y impose en effet l’alternance entre le « jihad » et la « dhimmitude » et avec les Turcs seldjoukides, cette dernière est particulièrement oppressante.

La croisade de Godefroy de Bouillon répond alors à l’appel de Saint Bernard écrivant :

« La chrétienté d’Orient se trouve dans une situation si désespérée que celui de nous qui resterait insensible ne mériterait plus d’être appelé enfant de l’Eglise… »

Après presque deux siècles de présence française, l’islam reprendra le dessus et les catholiques, notamment les maronites paieront souvent très cher au long des siècles leur fidélité à la France.

Aujourd’hui, le Liban demeure le seul pays de l’immense Orient où les chrétiens ne sont pas des sujets « tolérés », des citoyens de deuxième catégorie, sans égalité de droits dans le cadre de la loi islamique, la charia. Bien des libanais musulmans, surtout sunnites, sont aussi, à l’évidence, marqués malgré les guerres, par l’influence des mœurs chrétiennes et attachés à une bonne laïcité du pouvoir, c'est-à-dire la naturelle distinction entre le religieux et le politique.

Lorsque nous sommes rentrés il y a quelques semaines du Liban, Catherine Renout, François Ferrié et moi, avions dit notre inquiétude et l’avons exprimé dans le numéro de Reconquête en cours d’impression.

Les paroles de Solange Gemayel et de Samir Geagea exprimant la crainte d’attentats et de troubles graves nous avaient frappés. Hélas, ils ne se trompaient pas.

En assassinant Pierre Gemayel c’est non seulement tout un symbole mais aussi toute une réalité que l’on a voulu atteindre. Pierre Gemayel était jeune, courageux, énergique, brillant.
Il était un des défenseurs les plus actifs de l’indépendance de son pays contre la main-mise syrienne. Le Patriarche Sfeir qui a célébré ses obsèques, a exprimé cela avec toute sa force de conviction.

Richard Haddad, vice-président de Chrétienté-Solidarité et moi-même avons, dès la nouvelle du meurtre, redit toute notre amitié et exprimé notre sympathie à toute la famille Gémayel. Richard était un grand ami et admirateur de Pierre.

Ce meurtre prend place dans une continuité d’assassinats depuis trente ans de ceux qui s’opposent à la main-mise de Damas, hommes politiques, journalistes, leaders étudiants, sans oublier l’assassinat de nos parachutistes au Drakar, de notre ambassadeur Delamarre, de notre attaché militaire le Colonel Gouttières qui avait été si attentionné pour moi.

La Syrie hélas dispose en effet au Liban de nombreux partisans, de beaucoup plus qu’une cinquième colonne, d’une grande partie de l’ossature du régime avec d’abord le chef de l’Etat et un président de l’Assemblée Nationale, qui lui sont dévoués, une partie de l’armée et surtout des services secrets.

Ceci explique la facilité avec laquelle les hommes de la terreur syrienne peuvent frapper, à peu prés qui ils veulent et presque où ils veulent, sauf au cœur du Mont Liban dans l’indomptable fief maronite de Bcharre.

Les Israëliens eux, dont on a vu cet été la grande ignorance dans laquelle ils étaient de ce qui se passait au Liban et des évolutions de ce pays, n’ont pas, tant s’en faut, les mêmes possibilités d’élimination.
Ils n’ont cessé d’annoncer leur détermination de tuer le chef du Hezbollah, Nasrallah, ils ont à ce jour échoué en ne réussissant qu’à bombarder des immeubles où il n’était pas. Le Mossad n’est peut être plus ce qu’il était.

En revanche, et c’est cela qui est inquiétant, les services secrets syriens sont toujours là et aussi les Iraniens, alliés peut-être mais également concurrents.

Rien ne prouve que Bachar el Assad , le dictateur Syrien, ait ordonné personnellement l’assassinat de Pierre Gemayel, pas plus que Poutine celui du colonel Alexandre Litvinenko. Mais Bachar el Assad est totalement tenu, encadré, par le régime mis en place par son père et ni les hommes ni les méthodes de terreur ne changent.

Il y a hélas dans la droite nationale française pas toujours si « nationale » que cela, des courants liés à l’étranger.

Les uns sont ouvertement inconditionnels de l’Etat d’Israël au mépris de ce que l’injustice faite aux Palestiniens et le non-règlement de la paix en Palestine, ont constitué une des causes essentielles de la tragédie Libanaise et menacent aussi la paix dans le monde. Ils en retirent peut-être quelques avantages.

Les autres, plus discrètement, ont des liens avec les ambassades de Syrie ou d’Iran ou autres encore. On a ainsi observé la complaisance pour ces pays de certains journalistes et de certains politiques mus peut-être plus pour certains, par une hostilité passionnelle contre Israël que par d’autres motivations.

Nous, nous ne sommes influencés ni par les « lobbies » pro-israëliens, ni par les « lobbies » pro-syriens ou pro-iraniens.

Nous, nous sommes pauvres.Nous ne recevons pas d’argent. Nous apportons aux œuvres de nos amis au Liban l’intégralité des dons que l’on nous adresse en réponse à nos appels, aide bien dérisoire par rapport à l’immense richesse du Hezbollah.

Car nous voulons que demeure la liberté de ce Liban aux montagnes surmontées de toutes les croix du sacrifice et de l’espérance de son peuple.

Nous n’oublions surtout pas que pour sa liberté sont morts nos paras parmi lesquels des amis de Chrétienté-Solidarité et sont tombés encore le capitaine Borella et mon ami Stéphane Zanetacci.

Et, politiquement nous voulons simplement la paix et la liberté pour les peuples du Liban, de Palestine et d’Israël selon les solutions très sages qu’a toujours prônées le Vatican.