vendredi 12 septembre 2025

Les libres propos d’Alain Sanders

 

L’anniversaire – 130 ans – de la naissance de Pierre Gaxotte (1895-1982)

 

Comme il ne faut pas attendre du ministère de la Culture (et encore moins de « leur » République) une quelconque commémoration du 130e anniversaire de la naissance du grand historien que fut Pierre Gaxotte, c’est à nous – c’est un devoir et un honneur – de combler ce manque.

Pierre Gaxotte est né dans une famille lorraine (plutôt républicaine), le 19 novembre 1895, à Revigny (Meuse). Une scolarité sans histoire(s) à Bar-le-Duc puis, ayant obtenu une bourse d’études, arrivée à Paris en octobre 1914, au lycée Henri-IV. En 1917, il entre à l’Ecole normale supérieure. En 1920, il est reçu premier à l’agrégation d’Histoire (il est également licencié ès sciences et agrégé de géographie.

Professeur au lycée d’Evreux en Normandie, puis à Charlemagne à Paris, il se rapproche des royalistes. Il sera ainsi secrétaire de Maurras pendant un semestre et secrétaire de rédaction de L’Action française où il publiera par ailleurs ses premiers articles (une bonne centaine).

Il n’a pas 30 ans quand Arthème Fayard lui confie la rédaction en chef de Candide, puis celle de Ric et Rac, fonctions qu’il occupera jusqu’en 1940. En 1926, le même Arthème Fayard, admiratif de l’intelligence analytique de Gaxotte, lui suggère d’écrire un livre. Ce sera – excusez du peu – La Révolution française. Il y attaque de front les thèses marxisantes et laïcardes fabriquées par les historiens IIIe République. Le livre, devenu depuis un classique, va trouver immédiatement son public. Suivront Le Siècle de Louis XV (1934) et Frédéric II (1938), eux aussi constamment réédités et révisés.

Replié à Clermont-Ferrand pendant l’Occupation, il s’attelle à un monument, Histoire des Français (paru en 1951), et à une somme, Histoire de l’Allemagne (paru en 1963). Deux essais qui continuent de faire autorité.

Après 1945, il renoue avec le journalisme : directeur littéraire du magazine Elle, il écrit dans La Vie française, La Revue de Paris, le Bulletin de Paris, Le Figaro, Spectacle du monde, etc. En janvier 1953, il est élu à l’Académie française au fauteuil de René Grousset (il en sera le plus jeune membre).

L’historien Jean Tulard (qui en pince plutôt pour Napoléon, assassin du duc d’Enghien, de Frotté et de Cadoudal comme on sait) dira de Gaxotte : « Demeuré maurassien et royaliste, il se tint à l’écart des modes et des honneurs, fidèle à ce XVIIIe siècle vif et spirituel qui savait considérer les choses avec sagesse, indulgence et scepticisme. Face à l’invasion d’un jargon économico-philosophique, il continua à écrire des livres d’Histoire clairs et bien construits, ce qui n’excluait nullement d’immenses lectures et de non moins grands dépouillements d’archives ».

Outre des ouvrages incontournables comme ceux déjà cités, mais aussi Versailles que j’aime (avec Jacques Perret et Roger Nimier, éditions Sun, 1958), Paris au XVIIIe siècle (Arthaud, 1968), Molière, fameux comédien (Hachette, 1971), Les autres et moi (Flammarion, 1975), etc., on doit à Gaxotte des éditions des Lettres de Louis XV, du Discours de la méthode et des Passions de l’âme de Descartes, des Œuvres d’Alfred de Vigny et d’un choix de Mémoires de Saint-Simon.

Je crains, hélas, que soit cassé le moule qui nous donnait de tels hommes…

Alain Sanders