À l’évidence, Emmanuel
Macron fait partie de ces hommes politiques intimement persuadés qu’ils tracent
la route d’une destinée historique impériale.
Le grand philosophe
catholique René Girard a abondamment traité de l’importance du mimétisme non
seulement dans la formation de la personne dès le plus jeune âge mais aussi
bien des comportements individuels et collectifs. Chez nombre de personnages
politiques transparaît l’importance de l’imaginaire mythique qui les inspire
plus ou moins consciemment.
Ainsi, la continuité d’attitudes
mimétiques de celles des « grands ancêtres » de la République, telles
que sans doute assez justement déduites au théâtre ou au cinéma de la
grandiloquence des discours de personnages se drapant, altièrement, dans les
vertueuses ostentations des Robespierre et Saint-Just.
Beaucoup d’observateurs
ont de même noté l’évidence de l’importance du mimétisme bonapartiste chez
Emmanuel Macron. Sans doute a-t-il un peu de l’énergie du jeune général de la
Révolution devenant Premier Consul. Et sa gestuelle évoque-t-elle ce que l’on a
pu restituer à la scène de celle du futur empereur.
On a aussi observé
combien Macron semble affectionner de revêtir les tenues diverses des
différents corps qu’il visite : treillis militaire bien seyant et autres.
Il me rappelle un peu
ainsi les usages de Saddam Hussein qui ne se déplaçait jamais sans son
photographe préféré qu’il m’arriva de rencontrer à Bagdad. Chaque soir, à 22 h
s’il m’en souvient bien, l’émission de la télévision d’État se terminait durant
un bon quart d’heure avec le défilé rétrospectif des photos préférées de Saddam :
on le voyait bien sûr dans son uniforme militaire habituel mais encore en
treillis de combat avec sa kalachnikov puissamment portée à bout d’un seul
bras, on le voyait en aviateur, en tankiste, en chamelier, mais on le
découvrait aussi nageant vigoureusement dans le Tigre comme jadis Mao dans le
Yang-Tsé.
Il apparaissait également
en chef de l’État en très chic costume européen, ou encore en bon père de
famille en tenue d’été comme chez nous, avec ses enfants autour d’une braserade
à l’irakienne. Saddam était filmé encore en cinquante autres tenues. Même en
pêcheur à la mouche !
À vrai dire, dès l’irruption
de la civilisation de la photo et du film, tous les dictateurs ont aimé de même,
non sans raison, se faire voir de leur peuple : histoire en effet de
montrer qu’ils en sont comme les bienveillants détenteurs de toute la
diversité.
Quelque chaîne de
télévision pourra peut-être ainsi de même terminer une soirée avec Macron en maints
habillements en moult circonstances, avec ou sans Brigitte.
Macron n’est pas tout à
fait dans le registre « pipol » de Sarkozy. Ce qu’il veut, à n’en pas
douter, c’est que soit essentiellement donnée de lui une auguste image
euro-impériale.
Voilà pourquoi il ne
nous semble pas très important de débattre sur les qualifications idéologiques
que l’on peut lui imputer : libéral ou socialiste ? De droite ou de
gauche ? étatiste ou fédéraliste ? En réalité, il est pour l’heure
une sorte de libéral-socialiste-fédéralo-eurocratique. Il est sociétalement
révolutionnaire et socialement capitaliste.
Mais ce que cet
autoritaire, à ses heures plein de suffisance, veut imposer avant tout, c’est la
figure de l’empereur Macron.