lundi 9 novembre 2015

La République du meilleur des mondes selon Cohn-Bendit.



Dans notre « meilleur des mondes » tel qu’anticipé génialement par Aldous Huxley et sans cesse plus sophistiqué, Daniel Cohn-Bendit tient évidemment un rang de super « alpha-plus », un parfait spécimen de ce que le néo-marxiste Jacques Attali désignait comme « l’hyperclasse, créatrice, jouisseuse, et nomade de luxe… entraînant la société entière vers l’utopie de la Fraternité » (Dictionnaire du XXI° siècle – Fayard).

Quoique sans aucun mandat électif ou responsabilité politique, Cohn-Bendit s’est assuré un statut de prophète contemporain ou de pythie. Il est régulièrement appelé à délivrer entre autres ses oracles sur l'émission de France-Inter de Patrick Cohen, il parle chaque matin sur Europe 1 et il est encore invité, comme ce dernier samedi, à débattre dans le Figaro. Avec Denis Tillinac, Marie-Laetitia Bonavita et Éléonore de Vulpillières ayant recueilli leurs propos.

Passons ici sur leurs considérations respectives quant au fonctionnement  des institutions ou encore sur l’accueil des migrants qui, pour Tillinac doit être limité et pour  Cohn-Bendit, illimité, dès lors qu’ils sont des « réfugiés politiques ». Or on sait ce qu’il en est de cette spécification.

Ce que l’ancien anarchiste soixantuitard devenu super alpha-plus livre de plus intéressant, c’est ceci :

« Il y a des moments historiques où les élites s’érigent en rempart contre des pulsions mortifères du peuple, et heureusement ! »  Et de citer à l’appui de cela : « De Gaulle en 1940, quand il décide d’agir contre Pétain, puis en 1962 quand il signe l’indépendance de l’Algérie alors qu’il s’était engagé à garder l’Algérie française ». Et de conclure :  « La France d’en bas n’a pas forcément raison. Le bon sens du peuple contre l’arrogance des élites est une dialectique imaginaire ».

Je n’aborderai pas ici longuement la question de ces deux exemples : le premier mériterait d’être considéré notamment à la lumière des réflexions de la grande journaliste et écrivain juive Annie Kriegel ou de notre ami l’historien François-Georges Dreyfus.

Sur le second, le moins qu’on puisse observer, c’est que Cohn-Bendit si donneur de leçons « droitdelhommesques » n’a cure de l’immense abomination tortionnaire et exterminatrice qui suivit la signature du chiffon de papier des accords d’Evian. En revanche, l’expression « la France d’en bas » pour désigner le peuple est éminemment significative. C’est le mépris de très mauvais « aristos » pour les manants, c’est le mépris des bourgeois façon Marx et Engels pour les prolétaires qui n’ont d’intérêt qu’en tant que masse à manipuler (voir Manifeste du parti communiste).

Cohn-Bendit ajoute la remarque fondée : « Hitler a été élu démocratiquement au même titre que les islamistes voulaient l’être en Algérie ».

Mais dans la foulée, il exprime encore : « On peut s’interroger sur la démocratie aux Etats-Unis : le peuple vote mais c’est l’argent qui préempte la campagne ».

À bien suivre sa défiance de la démocratie non contrôlée par les élites, cette « préemption », à l’évidence, est pour lui une bonne chose. Aux Etats-Unis plus qu’ailleurs la démocratie est en effet essentiellement une ploutocratie. Ce système convient donc bien à celui qui pourtant fut en 1968 surnommé « Dany le rouge ».

Car en fait Dany est passé par toutes les couleurs successives ou mêlées des révolutions rouges ou noires. Il a été « rouge » mais sans adhésion à quelque courant bien identifiable des internationales socialistes et communistes successives et sans trop se compromettre non plus avec les gauchismes terroristes de la « Fraction de l’armée rouge » et de la « bande à Baader », héritiers de Netchaïev et Bakounine. Il a été « noir » mais pas dans la tradition des passages à l’acte de Ravachol.

Son empirisme révolutionnaire ne l’inclinait qu’à de prudentes provocations estudiantines, et surtout à de la gloriole d’exhibitionnisme pan-sexualiste sur les pelouses de Nanterre avec Françoise, la fille d’un ministre du Général de Gaulle qui fera ensuite carrière dans l’UMP notamment au Conseil de Paris.

En fait Cohn-Bendit était fondamentalement un révolutionnaire « gaucho-bobo ». Ceci ne signifie nullement que sa révolution culturelle et sexuelle à laquelle il adhérait était la moins dangereuse. Car relevant plus de l’infiltration insidieuse et de la destruction corrosive, elle n’a pas, comme les formes sanguinaires du terrorisme, suscité l’effroi et les réactions de riposte. 

À la différence des fanatiques maoïstes, Cohn-Bendit a ainsi depuis sa jeunesse opté en fait pour une conception plus rose de la révolution, (quelquefois douceureusement pédophile), celle d’un écologisme vert, mâtiné de néo-marxisme et de néo-freudisme. Cette idéologie est très conciliable avec l’ultra-individualisme libéral en symbiose avec le capitalisme d’une rassurante ploutocratie mondialiste. Sans autres entraves que celles des traités et réglementations écologistes dûment concoctées et contrôlées, avec ses grandes cérémonies telles que la COP 21 dont, sans nul doute, les ukases glaceront les banquiers, feront trembler d’effroi tout le système solaire et paralyseront de peur les volcans.

Mais faute de pareilles conséquences, du moins notre pingouin national venu d’on ne sait quelle Hollandie pourra-t-il du moins jouer les utilités dans la beauté du témoignage de sa belle harmonie retrouvée avec la si royale écologiste Ségolène.

PS : Si l’actualité n’exige pas impérativement des communiqués, je ne réécrirai ici que mardi 17 novembre, de retour chez moi après notre Salon du Livre où nous nous retrouverons très nombreux.